Après la perfection atteinte par « Violator », j'étais prédestiné à trouver un peu moins bon ce « SOFAD ». Et c'est en fait assez logique, le groupe étant en perpétuel évolution et remise en question, il est rare que les pistes de chacun de leurs disques forment un tout totalement cohérents. Ici, les Modes se cherchent de nouveau à travers le Blues et le Gospel.
Dans le livret accompagnant le CD, les photos ne mentent pas. Ils posent avec guitare, basse, batterie (à laquelle s'essayera tout au long Alan Wilder), piano et semblent avoir oublié leurs synthés sur Violator. En pratique, c'est tout autre chose, l'électronique est toujours présent dans leurs chansons, bien que moindre. Cette fois-ci, les machines ne sont là que pour accompagner l'instrumentation plus organique voulue par Mark Ellis Flood et Dave Gahan, lui en plein trip Grunge, ayant découvert la drogue depuis peu. Pour la première fois, la bande fait appel à des musiciens extérieurs, principalement pour les cordes et les choeurs gospels ornant toute la pièce.
Au niveau du thème, vous l'aurez compris par le titre, Martin Gore continue sa quête de spiritualité. Il n'est plus simple nanti comme il y a 10 ans sur « Blasphemous Rumours » mais prône maintenant la foi en Dieu, qui est en chacun de nous, la dévotion à l'humain. Il nous parle aussi de ces gens qui jugent et qui condamnent, sans rien connaître de la personne sur « Condemnation », sans doute l'emprunt Gospel le plus réussi de tout l'album. Thème en commun avec « Walking in my Shoes », single que beaucoup apprécient mais qui me laissent de glace.
Car malgré cet hétérogénéité, le tout reste homogène par ses mélodies qui ne dépassent pas le simple côté méditatif, telle une longue prière religieuse qui n'apporterait aucune révélation. Cet absence de tubes n'empêchent pas d'offrir de très bonnes plages, « Mercy in You » et « In Your Room » ont par exemple déjà cet aspect trip-hop dues aux caisses et à l'ambiance, caractéristiques des années 90. Les grattes s'y fondent par des reverbs et autres effets distordants, apportant un plus à l'atmosphère électrique générale. « Get Right With Me » et « Rush » qui suivent assumeront encore plus ce côté rock, quoi que plus oubliables, un peu comme ce « Judas », ballade facile chantée par Martin, malgré le choeur final.
La production étant toujours assurée par Flood, elle est tout de même un peu moins propre que sur Violator, permettant alors au groupe encore plus de digressions instrumentales. « I Feel You » qui lance l'album possède un riff répété et entêtant à la manière d'un « Personal Jesus », en moins dingo, privilégiant le blues, mais qui derrière, fourmille d'idées de sons divers. Pareil pour « Higher Love » qui conclut le disque, les arrangements sont encore une fois tout simplement fabuleux, offrant même le retour d'un gimmick synthé typique de Depeche Mode. Enfin, orchestrale et plus minimaliste, « One Caress » fait partie de mes préférées, surtout d'un point de vue mélodique.
Une fois de plus, le groupe est donc tombé dans l'inconstance avec ce « SOFAD » qui n'en est pas moins un excellent album, ce qui est d'autant plus miraculeux que les relations en studio commençaient à se détériorer. La tournée "Devotional" qui en suivra est la goutte d'eau qui coûtera le départ de notre cher Alan Wilder... Historiquement, cet album de 93 est donc important.
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