Ce 3e album de Pink Floyd en 1969 est sa 1ère B.O. et le 1er sans Syd Barrett, dont il subsistait une présence même limitée dans « A saucerful of secrets ». On voit alors mal l’avenir d’un groupe dont le génial leader est devenu incapable de jouer et composer quoi que ce soit. Les membres eux-mêmes se posent des questions mais ne pensent pourtant jamais à raccrocher. C’est le réalisateur franco-suisse Barbet Schroeder qui leur donne l’occasion de composer la B.O. de son film « More », une histoire d’amour et de drogue sous le soleil enchanteur d’Ibiza, au final très sombre puisque le film bien que situé dans un cadre enchanteur est une véritable descente aux enfers.

Si le film n’a pas marqué l’histoire du cinéma et a aujourd’hui terriblement mal vieilli, la musique du Floyd est bien plus intéressante et elle permet au groupe d’amorcer le virage de l’après-Barrett, les musiciens se permettant de multiples expériences, diversifiant sa musique presque à l’extrême avec des ballades psychédéliques comme le magnifique « Cirrus Minor » (repris chez nous par Daho, fin connaisseur de la pop anglo-saxonne), débutant avec des chants d'oiseaux qui sont partiellement recouverts par des accords d'harmonium solennels, sur lesquels s'élève la voix de Gilmour pleine de réverbe comme dans une église, accompagnée par une guitare acoustique. Différents effets donnent une atmosphère onirique au morceau. Mais Pink Floyd peut durcir le ton avec le quasi free jazz « Up the Khyber » qui met en musique un very bad trip de façon magistrale ou "The Nile Song" avec ses guitares saturées, un Gilmour à la voix bien plus agressive et Mason martelant sa batterie comme un furieux, sans doute un des morceaux les plus violents du Floyd ! Du heavy rock, tout simplement.

Le groupe glisse 2 ballades folk plus apaisées, « Green is the colour » et « Cymbaline » qui vont devenir des pierres angulaires des concerts qui vont suivre, d’une beauté simple et efficace. Des influences du flamenco pour faire couleur locale ? Vous en voulez, en voilà ! « A Spanish piece » le démontre même si c’est plutôt anecdotique. Gilmour s’impose ici comme un guitariste exceptionnel dans « Main Theme » et « Dramatic Theme ». Un groupe en devenir mais très créatif et qui ouvre avec cette B.O. des portes qu’il va franchir par la suite (suites plus longues, bruitages…). La suite de la période Barrett est ouverte et brillamment même si tout n’est pas inoubliable comme «Party Sequence » par exemple. Un album injustement oublié par le grand public aujourd’hui au profit des grandes œuvres des seventies et pourtant à redécouvrir. Le Floyd n’a peut-être jamais été aussi varié.

JOE-ROBERTS
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le 25 oct. 2024

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