C'est plusieurs mois après l'écoute de Wave, nécessaires à la digestion de ce chef d'oeuvre total (cf mon Top10 Albums), que je me suis attaqué à Stone Flower. C'est peut-être un peu crétin, mais si j'ai choisi de poursuivre ma découverte d'Antonio Carlos Jobim par cet album, c'est parce que parmi toute sa discographie, cette pochette m'a particulièrement tapé dans l’œil. J'ai souvent tendance à me laisser emporter par cette attirance purement visuelle, mais je dois avouer que ça marche plutôt pas mal.

Stone Flower, cinquième album du maestro, est sorti en 1970. C'est pourtant un disque très marqué jazz que compose Jobim : la pleine expansion du phénomène bossa nova ayant saturé le "marché" (beurk) d'albums insipides, composés par des artistes médiocres souhaitant profiter du petit côté piquant brésilien, ce dernier s'intéresse à la musique américaine par le biais de Johnny Alf, qui sera son initiateur. A croire que Johnny a bien fait le boulot, puisqu'en plus d'avoir instauré une centaine de standards de bossa nova, A.C. Jobim impose à l'époque une nouvelle référence dans le monde du jazz.

Toutes fraîches et spécieuses, les compositions de Stone Flower inspirent une ambiance que j'ai eu plaisir à intérioriser. Pourtant très différente de celle de Wave, qui dégageait une sorte de mélancolie joyeuse (que le mot portugais "saudade" semble si bien définir) ce disque montre que cet innovant, prolifique et sublime pianiste peut nous emmener où bon lui semble. Un peu lunatique, mais surtout cinématique, cette musique nous laisse facilement glisser vers des paysages imaginaires teintés de vert, de bleu. Entre douce extase et plénitude, on sent un Jobim en pleine forme, qui nous fait le plaisir de nous offrir sa voix, et nos oreilles ne s'en plaindront pas.

Toutefois, je trouve important de préciser que la qualité de cet album ne repose pas uniquement sur le talent du compositeur/pianiste. Eumir Deodato (musicien que je suis par ailleurs en train de découvrir) a fourni un boulot fantastique dans l'élaboration des arrangements. Les variations complexes proposées flottent sensuellement sur les rythmes délicats des bassiste, batteur et percussionniste. Ajoutons à cela le jeu des cuivres (si chers à Jobim), les envolées malicieuses des flûtes et la complicité du piano électrique, et nous obtenons cette oeuvre admirable.

Stone Flower, une étape délicieuse, profonde et relaxante dans mon parcours Jobimien.


PS : La surprise ultime a été la présence du morceau "Brazil", que j'avais auparavant fumé une bonne cinquantaine de fois dans le dessin animé "Saludos amigos" (version de Ary Barroso) : http://dai.ly/xnnf3
Hypognosis
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le 29 mars 2014

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