"Techno wasn't designed to be dance music, it was designed to be a futurist statement" Jeff Mills
Il semble aujourd'hui impossible de parler de Stroboscopic Artefacts sans verser dans la surenchère, tant le petit label de Lucy a réussi à s'imposer comme un des labels les plus pointus en matière de techno, arrivant à concilier sous le même toit techno très efficace et recherche absolue du sound design. Et cet album du Singapourien Xhin semble vraiment porter cette double exigence à son paroxysme.
Car loin d'imiter ses collègues Lucy et Dadub (chroniqué ici) et d'expérimenter en utilisant une base de dub techno, Xhin s'aventure dans des territoires d'habitude inexplorés, en manipulant des structures typiquement IDM. Ainsi, les deux morceaux qui suivent la nécessaire introduction The Secret Closet ressemblent à ce que pourrait produire Autechre si les deux natifs de Rochdale avaient décidé de se lancer dans la techno, Fox and Wolves et surtout Teeth semblant tout droit sorties d'Untilted qu'on aurait accouplé au sound design du Risp de Richard Devine. De même il est impossible de parler de Medium sans évoquer ces structures terriblement drill n' bass, ces accès glitchesques et ces abcès purulents d'acide qui éloignent ce morceau de la techno pour en faire une sorte de crossover.
Sword semble même parfois ressembler un peu à Drukqs, surtout au niveau des deux morceaux ambient Insides et Wood, semblant composés au piano préparé et enchâssés entre deux perceuses drill n' bass comme pour contrebalancer leur puissance, l'album se finissant également par une track plus ambient au timbre légèrement voilé, This Is What You Drew While You Were Half Asleep. Ce qui pourrait paraitre nuire à l'album en le rendant incohérent n'apparait en réalité pas si néfaste, permettant parfois de solidifier ce magma de sonorités acides et de bourdonnements, et rend l'album encore plus riche au niveau des textures utilisées.
Avec seulement deux morceaux de techno "traditionnelle", Xhin s'éloigne de ses oeuvres précédentes, notamment de sa très bonne Monad III (toujours chez SA) et s'éloigne d'une optique dansante pour proposer une véritable oeuvre d'analyse et de déconstruction de la techno, dans un hybride monstrueux, au sens antique du terme.