The Book of Secrets par Ripailloux
La musique celtique... Dur. Pas facile de cerner le phénomène. On oscille entre grand cliché et attirance presque mystique. C'est sur cette base que se fonde le plus souvent l'admiration envers la musique de Loreena McKennitt. Cette chanteuse canadienne réussit en effet un incroyable tour de passe passe. Malgré le fait que sa musique soit totalement ce qu'on attend d'un album grandiose de musique celtique, on est jamais déçu.
The Book Of Secrets est le sommet de son art. Jamais avant et jamais après elle ne réussira à retrouver cette perfection tant sur le point de vue du choix des mélodies que de l'arrangement... En effet, là où cet album nous saisit directement, c'est par l'efficacité de son instrumentation. L'introduction de "Skellig" en est un superbe exemple. La mélodie n'est pas évoquée dès le début mais le tapis sonore s'installe doucement par l'intermédiaire d'abord d'un violon évocateur puis surtout de cette flute, perdue entre les nuages, presque absente, mais tellement belle.
Chaque morceau bénéficie de ce fait d'une instrumentation extrêmement travaillée, délicate, et qui permet à la mélodie de pouvoir se développer avec une incroyable et remarquable aisance. Car bien sûr si on écoute bien, y a rien de novateur chez McKennitt, le chant est certes réussit mais est plutôt classique, les harmonies ne sont pas foudroyantes. Mais alors qu'est ce qui fait que ça marche ? La perfection de l'assemblage. C'est une recette, mijotée aux petits oignons, qui permet de nous faire retrouver une certaine innocence musicale, comme si notre oreille découvrait ces sons, découvrait ces musiques, ce style...
Bien évidemment les musiques en elle-même sont quand même bien écrites ! Notamment les plus entêtantes, "La Serenessima" ou "Marco Polo". Elles sont aussi très réussies car malgré un semblant de points communs elles sont très différentes. Loreena McKennitt a beaucoup voyagé et ça s'entend. Elle absorbe les différences influences, orientales comme occidentales, celtes comme latines, et de ce fait propose en réalité une palette très variée de musique à tendance folklorique. Là où on croit au début n'écouter qu'un album venu du fin fond des terres celtes on prend finalement part à un grand voyage. Et le début de "Dante's Prayer" pourra alors vous évoquer le moment où le bateau, parti à la conquête de terres lointaines, s'enfonce dans un brouillard inquiétant mais fascinant (bon le THC dans le sang ça aide à penser à ça aussi hein).
Bref, c'est toujours difficile d'expliquer et de retranscrire facilement sa fascination envers une œuvre de ce type. Car là où certains artistes nous séduisent par des arguments qu'on a l'habitude d'appréhender (technique, recherche, efficacité rythmique et mélodique), Loreena McKennitt sous un semblant de non-originalité nous propose autre chose. Elle prend le risque d'aller affronter les gros clichés celtes mais réussit le tour de force de pondre un chef d'œuvre. La science de ses arrangements, ses diverses influences, ses mélodies accrocheuses et son côté grandiose font de cet album un de mes préférés.
Et si vous n'aimez pas c'est que vous n'avez aucune sensibilité, NAH !