The Broken Man
7.7
The Broken Man

Album de Matt Elliott (2012)

Matt Elliott, éternel romantique. Derrière ses machines (The Third Eye Foundation), il nous faisait suivre la route d’une âme que l’on imaginait sombre et tortueuse. D’ailleurs, dans le livret du bien nommé Ghost (1997), on voyait une montagne fière et abrupte, comme le symbole d’une musique difficile d’accès. Au piano, à la guitare sèche et au chant, sous son propre nom, l’anglais est toujours aussi mélancolique. Mais The Broken Man est plutôt un album de plat pays, où toutes les routes se ressemblent, immuablement droites, comme froidement tirées au cordeau. Attention à ne pas s’endormir au volant…

La fougue des premiers albums électroniques et tempétueux semble avoir définitivement cédé la place à un folk répétitif et sans nuances. Ce virage pris il y a maintenant une petite dizaine d’années est ici confirmé : Matt Elliott a curieusement perdu son âme en « humanisant » sa musique. On aurait pu penser qu’en délaissant la voie de l’électronique au profit de celle de sons plus naturels, boisés, qu’en cédant son nom de scène au profit de son patronyme il se dévoilerait encore plus.

Mais non, à l’écoute de ce nouvel album, on a au contraire le sentiment d’entendre un robot qui fait ses gammes. Les notes s’enchaînent, parfois avec une certaine technique, mais sans la moindre intensité dans le jeu. Chaque mélodie est un calque de la précédente, chaque titre une variation tranquille sur un seul et même thème souffreteux. L’anglais s’emploie parfois à enrichir le son par des chœurs féminins fantomatiques (directement sortis de The Third Eye Foundation) ou bien par des déflagrations lointaines de bruit blanc. La beauté affleure alors, mais elle reste comme paralysée par la torpeur des gammes. Et les triturations sonores habiles font alors seulement office d’ajout un peu artificiel.

Cette apathie est peut-être recherchée par Elliott ; il y a une forme de tristesse monolithique et indéfectible qui parcourt l’échine de The Broken Man, elle est palpable. Mais on peut regretter que le chemin à suivre pour l’auditeur se fasse en ligne droite, sans détours, sans surprises, avec une régularité parfois irritante.

Francois-Corda
4
Écrit par

Créée

le 2 janv. 2019

Modifiée

le 12 juin 2024

Critique lue 125 fois

François Lam

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