Les Nocturnes de Chopin sont bien connues : summum de romantisme intimiste, premières amours classiques de nombreux mélomanes... Mais on sait moins que leur forme, à savoir pièce réduite (5 ou 6 minutes d'exécution tout au plus), marquée par un tempo lent et beaucoup d'ornements du côté des arpèges, à quelques occasions plus mouvementées, fut fixée au début du XIXe siècle par... un Irlandais du nom de John Field.
Confidentielles, ces 18 pièces furent une inspiration pour Chopin et furent plus tard collectées par Liszt, avant de tomber dans l'oubli. Un peu à l'image de la vie de leur auteur, baroudeur et pédagogue hors-pair, mort d'épuisement en 1837, plusieurs années après s'être établi dans l'Empire de Russie comme professeur-interprète.
Délicates, soyeuses et profondément émouvantes, ces Nocturnes de Field résistent difficilement à la comparaison avec leurs brillantes homonymes polonaises. Mais elles demeurent d'une grande sincérité, et offrent quelques envolées d'un romantisme tantôt étouffé, tantôt bouillonnant qui ravira les oreilles les plus suaves. L'interprétation retenue de son compatriote Miceal O'Rourke, pétri de l'héritage fieldien, et une prise de son superlative, achèvent de faire de ces compositions originales un moment de grande volupté.