J'ai longtemps entretenu un préjugé tenace à l'égard de WASP, tout entier fondé sur ce nom de groupe d'un goût douteux qui cachait forcément, au pire, une bande de néo-nazis abrutis par le soleil sudiste, au mieux, un groupe de beaufs attardés. Le tout sans avoir jeté ne serait-ce qu'une oreille distraite sur une seule chanson et malgré les louanges répétés de l'ami Dagoni. C'est dire l'étendue de ma connerie quand-même.
C'est donc en les voyant à l'affiche du Rock Fest Barcelona auquel je comptais me rendre que je me suis enfin décidé à aller écouter The Crimson Idol.
Et la première chose qui m'a frappé et qui me frappe encore à chaque écoute, c'est la qualité musicale de l'album. Même si rien n'est véritablement original, la qualité de la composition, du son, de la voix et des autres instruments, n'ont strictement rien à envier aux classiques du heavy metal, Iron Maiden ou Saxon en tête. On est instantanément porté par les ballades nostalgiques ou les refrains incantatoires, il y a quelque chose de frais, d'immédiat dans cet album qui ne manque pas de séduire.
Puis se fait jour une autre révélation : certains motifs mélodiques reviennent au cours de l'album comme par exemple le refrain "The Crimson Idol" ou encore "Love, set me free". Comment ? Pourrais-je être face à un concept album (là c'est le moment où je me suis senti vraiment très con) ?
Et The Crimson Idol est bien un concept album puisqu'il raconte l'histoire de Jonathan Steel, un gamin délaissé par ses parents qui devient une rock-star mais tombe finalement dans la drogue. Un concept qui n'est certes pas révolutionnaire mais a le mérite d'être totalement convaincant et de créer une véritable empathie pour ce personnage tragique.
Là où ça devient vraiment intéressant, c'est que Blackie Lawless (sous ce pseudonyme encore une fois douteux se cache le leader du groupe et quasi-unique compositeur de The Crimson Idol qui devait à la base être un album solo) est un très grand fan des Who. Cette intuition venue à l'écoute de l'album m'a depuis été confirmée par (Wikipédia) la reprise par WASP de The Real Me sur The Headless Children et en live.
L'influence des Who et notamment de leur album Quadrophenia est en effet très sensible. D'abord à travers les thèmes évoqués, certaines chansons se faisant directement écho comme Doctor Rockter qui évoque The Real Me, I am One I'm One (malgré des thématiques et mélodies très différentes pour le coup) mais surtout le final qui rappelle énormément Love, Reign O'er Me.
Dans la façon de composer l'album ensuite, The Crimson Idol entrant dans ma catégorie très select des concept albums où la construction musicale épouse l'architecture de l'histoire, avec comme déjà évoqué, certains thèmes revenant à plusieurs reprises interprétés différemment pour évoquer tour à tour le succès ou le besoin d'amour de Jonathan Steel.
Il ne faudrait pas pour autant qu'un fan des Who tombé sur ma critique par hasard croie que cet album est fait pour lui : le style est bien éloigné du rock à claviers d'un Quadrophenia (malgré quelques traces par moment), et puis le concept est tout de même moins poussé. Mais j'aurai rarement écouté un album mêlant aussi bien finesse d'écriture et efficacité rock n'roll !
Quant à l'acronyme ? Après quelques recherches, il semblerait qu'il n'ait pas de signification explicite, mais entre le premier degré White Anglo-Saxon Protestant, les second degré We Are So Perfect, We Are Satan's Preachers et celui que leur a trouvé une association de parents américaine We Are Sexual Perverts j'ai vraiment du mal à en trouver un d'acceptable... Qu'importe, tant que la musique est bonne !