Une proposition différente de ce qu'a pu faire le groupe auparavant

Première critique écrite y a longtemps
Bon, j’aurai pas attendu de m’écouter l’intégral des albums de Pink Floyd pour écouter leur dernier. Car oui, qu’on le veuille ou non, Pink Floyd s’est éteint en 1994. Certes, il y aura le grandiose PULSE, album concert sur la tournée de 1995. Et il y aura également The Endless River sorti en 2014 (plutôt naze je trouve). Bref, Division Bell, c’est un peu l’album testament du groupe, celui qui se devait de conclure en beauté la gigantesque discographie du groupe. David Gilmour se devait d’être à la hauteur pour ne pas décevoir.
Or, on le sait tous, le faible de Gilmour, c’est les paroles. Il l’a dit lui-même et a, à de très nombreuses reprises, demandé à Roger Waters de lui écrire ses paroles (requêtes souvent déclinées par Waters, laissant Gilmour se démerder seul). Bref, Gilmour n’ayant personne à part sa femme Polly Samson pour l’aider à écrire ses foutus paroles, il faut bien s’étonner que ça ne soit pas aussi bon qu’un Waters (à quelques exceptions près). Il aura au moins le réconfort de voir Richard Wright (viré en 1989 par Waters lors de l’enregistrement de The Wall) rejoindre le groupe pour ce dernier album.
Au final, The Division Bell est à la fois une réussite et une déception. Une réussite parce qu’avec l’absence de Waters, le trio Gilmour/Wright/Mason a réussi à nous livrer un album de qualité avec des morceaux qui marqueront à jamais leur discographie. Mais cet album a été une déception pour pas mal qui n’ont vu en ce « final pinkfloydien » un album bien mais à des années lumières d’un Dark Side of the Moon ou d’un The Wall. Car oui, c’est une évidence, les Floyd peinent à retrouver la virtuosité de leurs travaux précédents.
Waters l’avait dit en quittant le groupe, « Pink Floyd ne survivra pas sans lui ». Et on ne peut pas dire qu’il ait entièrement tort. Car oui, avec le départ de Waters, quelque chose dans le son Floyd avait disparu. Était-ce cette ambition qui avait mené Waters à écrire The Wall, ou encore le culot (toujours de Waters) à critiquer ouvertement l’industrie du disque ou la politique. Bref, on ne retrouve pas le vieux Floyd dans ce Division Bell.
On pourra même le sentir dans les paroles, Division Bell parle de communication, carrément l’inverse de The Wall qui s’axait sur l’isolation d’un homme. Bref, rien à voir avec ce qu’on a connu auparavant.
Mais
Même si The Division Bell n’a pas la saveur d’un Pink Floyd des années 70, on ne pourra pas dire que cet album est mauvais. En effet, les sonorités sont d’une beauté assez folle et les mélodies gèrent. Il n’y a qu’à écouter Coming Back to Life ou encore Keep Talking pour se rendre compte que Gilmour peut s’en sortir seul. C’est surtout dans les derniers morceaux que l’album devient vraiment puissant pour ensuite nous mener à l’ultime morceau, le dernier bébé Floyd : High Hopes.
Et franchement… whaou.
High Hopes, c’est vraiment le summum. C’est vraiment une conclusion quasi-parfaite pour un album et même pour toute la carrière du groupe. On sent la mélancolie dans la voix de Gilmour, on sent que la fin est proche avec ces bruits de cloches qui sonnent comme le glas. La chanson prend un rythme lent et chacune des notes font vibrer la peau et hérisser les poils tellement c’est dantesque. Et comme si ce n’était pas assez, le groupe nous quitte avec ce qu’il sait faire de meilleur, un bon gros solo de sa mère. Et bah franchement, le solo de High Hopes fait en lap-steel guitar, c’est le meilleur depuis celui de Comfortably Numb. C’est juste fou.
Et quand on finit un album d’une aussi belle manière, quand on finit une carrière comme ça, moi ça me fait vibrer. The Division Bell a beau ne pas être l’album qu’on attendait, il n’en est pas moyen génial et conclut superbement la carrière du groupe.


Nouvelle critique écrite le 14 septembre 2018


En y repensant, The Division Bell m'a plutôt marqué. Pas que ce soit l'album le plus fou, ni même le plus conceptuel du groupe, mais de cet album, se dégage une grâce et surtout un calme qui le rend particulièrement agréable à l'écoute.


Oublions la virtuosité d'un Dark Side of the Moon, l'acerbité et les critiques politiques d'Animals ou la folie destructrice de The Wall. The Division Bell, c'est l'album du repos, un regard sur l'ensemble de la carrière des Pink Floyd qui a eu quelques bas, mais surtout beaucoup de hauts.


De ce point de vue, il paraît alors évident que Division Bell divise (pas mal le jeu de mot). Entre ceux qui aiment le Pink Floyd à la dure auquel nous avait habitué Roger Waters (parti depuis bien longtemps), et ceux qui se laissent aller par cette petite aparté mélodique qui nous offre un David Gilmour sage mais non pas conscient des capacités du groupe.


Car souvenons-nous de A Momentary Lapse of Reason. Produit au pire moment, quand Waters poursuivait en justice Gilmour pour les droits du groupe; quand Mason était plus concentré sur sa collection de voiture et le 24H du Mans; et que Wright était encore un peu à l'écart (pour finalement revenir dans le groupe lors de la tournée qui suivit). L'album sentait la fatigue, le désir de continuer, mais il était sorti au mauvais moment, dans les pires conditions.


Ici, c'est différent. Les conflits du passé sont derrière le groupe, Wright est bel et bien de retour et même plutôt actif, Mason aussi est de nouveau impliqué, et Gilmour jouit de la présence de sa nouvelle compagne Polly Samson pour l'épauler aux textes. Ils ont eu le temps qu'il leur fallait pour produire cet album, dans les conditions les plus sereines (à bord du bateau/studio de Gilmour). Et surtout, le groupe se relance dans l'album concept. Ici, on parle du contact avec l'autre, carrément l'inverse de ce qu'ont pu être The Wall et The Final Cut.


The Division Bell coule comme l'eau d'un fleuve, tranquillement, sereinement, on se laisse emporter par le courant doux, et parfois, on se fait bousculer par quelques courants rapides. On démarre tranquillement, même un peu trop calme. Même moi qui suit assez ouvert à la proposition de Division Bell, je trouve l'introduction un peu folichonne. D'ailleurs, je ne suis pas non plus fan de What Do You Want From Me (qui reprend beaucoup de Have a Cigar mais sans le punch), et de Poles Apart qui, malgré son solo final assez beau, reste bien trop long. De même pour Marooned, morceau totalement instrumental qui se veut être un long solo, mais sans vraiment de montée en puissance.


La face A s'achève cependant avec brio avec A Great Day For Freedom, dont le solo final arrive à rappeler les envolées du groupe dans ses années de gloire. Ce morceau, c'est le premier rapide de l'album, celui qu'on a pas vu venir, qui nous prend par surprise, et on le quitte avec sourire parce qu'on s'attendait pas à passer un aussi bon moment.


En somme, de la Face A, je ne retiendrai que A Great Day for Freedom, mais c'est réellement la Face B qui vaut le coup dans The Division Bell. Comme si le groupe se rendait compte qu'il s'agissait de leur dernier album, que c'était la fin, ils se mettent à tout balancer par la fenêtre. On reste calme avec Wearing The Inside Out, seul morceau chanté par Wright, et je l'ai toujours dit, mais, j'adore sa voix, je trouve ça très dommage qu'on l'entende pas assez. Mais sinon, à part ça, le morceau est pas dingue non plus. Take It Back n'est pas incroyable, prenant mais sans plus. On dit souvent que les Floyd ont pioché chez U2, et effectivement, ça s'avère plutôt vrai. Mais pour moi, le vrai soucis du morceau, c'est son refrain vraiment répétitif et sa rythmique des plus plates.


Mais voilà, une fois passé Tack It Back, le reste de l'album tient du génie. A commencer par Coming Back To Life qui a le mérite de contenir trois solos de prestiges aussi bon les uns que les autres, Gilmour est inspiré et ça se sent, il chante également merveilleusement bien. La suite est elle aussi excellente, Keep Talking use d'un instrument qu'on entend peu, le talkbox qu'on avait déjà pu entendre dans le morceau Pigs Three Different Ones, mais ici, d'une façon plus harmonique, le tout accompagné d'un solo très prenant.


Lost For Words sonne comme la dernière ballade du groupe, place aux guitares sèches, et c'est surtout l'occasion de Gilmour de lancer un dernier coup de gueule à Waters (bah oui). L'histoire, c'est que Gilmour avait proposé à Waters de réintégrer le groupe, proposition refusée avec hargne. Lost For Words se veut cependant être une chanson sur les relations (comme le reste de l'album), et non sur les conflits. Un bon moyen de calmer les mœurs et d'enterrer la hache de guerre pour clore l'album en beauté avec High Hopes, le dernier grand rapide de l'album, et par conséquent du groupe.


Sorte de morceau testament sur les regrets des actes passés, sur la vieillesse et de sa dure réalité ( « the grass was greener » ou « l'herbe était plus verte »). Un beau moyen également d'évoquer Syd Barrett (dont le buste apparaît dans le clip), et d'offrir au groupe, un dernier solo planant au lap steel guitar, une des spécialités de maître Gilmour accompagné de Wright et de Mason qui se donnent à cœur joie dans cette épopée mélodique épique et mélancolique. Assurément l'un des plus grands morceaux du groupe, et certainement le meilleur post Waters.


Alors oui, Division Bell est comme beaucoup diront, un bon album, mais un mauvais Pink Floyd, et c'est à moitié vrai. Car l'incroyable audace dont faisait preuve le groupe dans sa jeunesse a laissé place à la sagesse, et c'est ce qui caractérise cet album. Ça pourra faire chier certains, mais pour moi, ça a toujours été une preuve de maturité, notamment de la part de Gilmour qui est ici, bien plus inspiré que dans A Momentary Lapse of Reason. C'est bel et bien le seul album où sa créativité et son style n'ont pas été freinée par Waters, alors pour une fois, soyons indulgents. Car n'empêche, même si The Division Bell a des longueurs, il a quand même le mérite de nous offrir d'incroyables moments, le temps d'un dernier album avec le meilleur groupe du monde.

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le 9 avr. 2017

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James-Betaman

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