En convalescence, Frank Zappa décide de se consacrer exclusivement à la composition ... et pendant les mois d'avril et mai 1972 il enregistrera deux albums de jazz fusion qui marqueront sa discographie de manière indélébile : "Waka/Jawaka" et "The Grand Wazoo". Alors que leur accueil fut mitigé au moment de leur sortie, ils sont maintenant considérés comme ses plus grandes réussites.
Pour cet album, par rapport à "Waka/Jawaka", il agrandit encore la section de cuivres, y ajoute une section bois, ainsi que 3 percussionnistes, l'ensemble musical est nommé du doux nom de "Grand Wazoo", tout comme le titre de l'album.
Il ne sera pas plus long que l'album précédent, et tout aussi intense, si pas plus.
Dès l'entame on est séduit par cette guitare funky auquel se superpose assez rapidement une bataille musicale, comme le suggère la pochette, entre la section de cuivres, rutilante, et la section des bois, pénétrante. La musique, louvoyante et séductrice nous emmène progressivement vers des sommets, passant par toutes sortes de feelings, tantôt plus rock, tantôt plus reggae, voire funky, mais toujours en filigrane, l'ensemble restant dans la tonalité d'un big band jazz ... le trombone donnant du corps à la composition, la trompette se faufilant dans les interstices, le morceau se terminant sur un solo captivant de Don Preston au mini-moog.
"For Calvin" poursuit l'aventure sous la forme d'une improvisation jazz lancinante et dissonante à la rythmique décalée, dont l'esprit Rock in Opposition (RIO) se nourrira, et proche également, par moments de ce que les Residents produiront quelques années plus tard, tandis que le court "Cletus Awreetus-Awrightus " et sa mélodie délirante nous entraîne dans une interprétation enjouée dont seul FZ détient le secret, avant de nous proposer avec "Eat That Question", un funk-rock devenant de plus en plus endiablé au fur et à mesure de sa progression, le morceau se poursuivant de manière aérienne, grâce à la guitare de FZ, avant de se terminer sur la thématique mélodieuse avec l'ensemble du combo, l'album, lui, se terminant sur "Blessed Relief", une ballade jazz apaisante, beaucoup plus classique, du plus bel effet.
Malheureusement, ces deux albums de jazz fusion seront aussi les derniers qu'il produira, en effet, devant leur insuccès, il décidera de se tourner vers une musique plus accessible, mais ça c'est une autre histoire ...