The Money Store par MVCDLM
Aaah Pitchfork. C'est aujourd'hui limite honteux d'avouer qu'on traîne sur ce site. Pourquoi ? Parce que c'est le lieu de la hype bobo élitiste barbus à chapeaux. Et que c'est pas bien. Difficile d'aimer la musique aujourd'hui: soit on la découvre par ce qu'on nous sert dans les médias mainstream et on devient donc un infâme collabo de l'Industrie, soit on traîne sur des média type Pitchfork donc et on devient un hipster caricatural élitiste qui passe à côté des vrais talents. Il nous reste quoi alors pour découvrir de la musique ? Lire/écouter/voir d'autres média ? Ca revient au même non ?
Tout ça pour dire que c'est grâce à Pitchfork que j'ai découvert ces artistes ici présents, à savoir Death grips, et que rien que pour ça, je leur en serait très reconnaissant. Découvert "I've seen footage" au détour d'un de leurs reportages vidéos, cet hymne à la fois entêtant, entraînant et joyeusement violent, je me le réécoute une deuxième fois, puis une troisième, une quatrième, etc... Morceau de l'année pour ma part, indubitablement. Alors on prospecte à la recherche des autres travaux de la bande, on commence par ExMilitary, mixtape bien crade et violente qui donne envie de foutre des coups (au sens propre), la rage de Stefan Burnett, qui hurle littéralement dans le micro, est communicative, portée par des instrus et des samples torturés et bien chargés, mais formant des mélodies étonnamment cohérentes et efficaces. Puis arrive le premier "vrai" album... Signé étonnament chez Epic, grosse Major (Avril Lavigne, Franz Ferdinand, Michael Jackson, etc...) chez qui on n'aurait pas forcément pensé retrouver les 3 lascars de Death Grips, tant leur hip hop cradecore est difficilement accessible. Mais c'est plutôt une bonne nouvelle, ça met en avant la bande sur le devant de la scène. Cet album donc, est plus accessible d'une façon de parler, Mc Ride hurle moins, mais sans pour autant mettre sa rage communicative au placard, et les mélodies plus travaillées, plus "tubesques" pour certains morceaux ("I've Seen Footage" donc). Mais qu'on ne se leurre pas, la démarche est la même que sur ExMilitary, elle a simplement évoluée. Des mélodies toujours aussi lourdes et torturées, dont l'oreille peu préparée ne sera peut être pas réceptive au premier abord, tant de violence pouvant provoquer un vif rejet par épuisement. Mais si on est voué à la cause du groupe ou que l'on veuille bien faire l'effort de persister, cela s'avère payant. Cet album a beaucoup tourné dans mes oreilles cette année, il ne me lasse pas, et même mieux, plus je l'écoute, plus le potentiel des morceaux grandit, encore et encore. Mention spéciale à "Black Jack" qui était un peu passée entre les mailles du filet aux premières écoutes, et qui tourne en boucle aujourd'hui dans mon lecteur mp3. Remarque qui vaut également pour ExMilitary.
Bref, accessible, Death Grips ne l'est pas pour la majorité des auditeurs, c'est indéniable. Mais le travail est là, avec de vrais morceaux bien construits au service d'une rage et d'une violence inouïe, communicative et limite jouissive.
Au printemps dernier, Death Grips a tout arrêté, tournée et promo, pour mettre en chantier un second album promis pour la fin de l'année, déjà. Si vite ? Cette qualité de travail sera-t-elle à nouveau au rendez vous ? Il est à espérer. En tous cas, si cet album est moins réussi, il n'enlèvera pas toutes les qualités de ce Money Store, qu'aucun autre disque ne détrônera du titre d'"album de l'année" à mon goût.