Tu es mon autre
La premiere fois que je t'ai écouté c'était il y a longtemps maintenant, tu es apparu comme une évidence, j'étais tellement triste et ta musique était exactement ce que je ressentais. Je me rappelle...
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le 18 sept. 2012
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Après une écoute assidue et prolongée des Smiths, je tend à penser que toutes les chansons composées et écrites par Morissey tournent globalement autour d'un seul et même sujet : l'amour qu'il ressent à l'égard d'un homme dont la vie est remplie de femmes, de la figure maternelle, aux relations occasionnelles jusqu'à son épouse. The Queen Is Dead ne semble pas échapper à la règle, et c'est peut-être leur album le plus construit et également le plus réussi. J'ai pensé qu'il serait intéressant d'aborder l'album de fond en comble en passant au clair les chansons.
La première, éponyme au nom de l'album, semble aborder un surface la royauté que Morissey critique avec vigueur. Il ne faut cependant pas oublier les messages qui traversent l'oeuvre : And I was shocked into shame to discover / How I'm the 18th pale descendant / Of some old queen or other. Morrissey semble ici argumenter sur sa proximité avec la figure la plus "puissante" de la femme, la reine, valeur qu'il fustige également "some old queen or other", il ne faut pas penser une seconde qu'il ait vraiment un lien de parenté avec la famille royale. Cette figure le rattrape cependant pour l'étouffer puisqu'il nomme au travers d'un mystérieux "she", qui semble être la mère de son bien aimé qui comprend son jeu et veut l'empêcher de le mener à bout : She said : "Eh, I know you, and you cannot sing" il tente alors l'esquive : "I said : "That's nothing - you should hear me play piano" pour pouvoir s'expliquer clairement, il tente d'inviter l'objet de son désir à sortir hors de la maison et de discuter, mais la conversation tourne mal et il se met à pleuvoir : We can go for a walk where it's quiet and dry / And talk about precious things /But the rain that flattens my hair ... / Oh, these are the things that kill me pour conclure par une phrase maladroite sur l'imposture que serait son hétérosexualité : All their lies about make-up and long hair, are still there. Morrissey ne parvient pas à faire changer cette personne, ce qu'il déplore, et accuse les maux de la société. La seule solution apparente reste de tuer la mère : The queen is dead, boys*. Pour rebondir sur "Life is very long when you'te lonely". La deuxième chanson de l'album est cependant plus anecdotique, et traite du rapport de Moz' avec son manager. qu'il ne voit que comme l'instrument pour poursuivre sa quête amoureuse (qui semble inlassablement vouée à l'échec), mais qui finit par se dresser contre lui par ses choix artistiques et sa morale datée. Le morceau n'étant pas formidable en soi, je me permet d'esquiver les citations. La troisième chanson quant à elle est peut être lyriquement la plus aboutie de l'album : elle exploite le problème de fond et le révèle au grand jour : *I know it's over, but it never realy began*. Utilise-t-il le terme "Mother" pour s'adresser réellement à sa mère ou comme une interjection? Je penche plutôt pour la deuxième solution, quand bien même, il s'avère que la personne de son désir soit avec une autre, dans une relation que Morrissey n'abreuve pas d'éloge :
Loud, loutish lover, treat her kindly / (Though she needs you / More than she loves you)*. Il revoit avec ardeur le moment où il lui parle, et ne comprend pas qu'un si beau jeune homme bourré de qualité soit seul ce soir, c'est à dire pas accompagné d'une femme. Ce à quoi il trouve en lui la réponse : Cause tonight is just like any other night / That's why you're on your own tonight / With your triumphs and your charms / While they're in each other's arms.... Peu importe où il fixe la barre, son talent et ses qualités ne suffisent pas à écarter les deux amoureux. Il ne nie cependant pas la grande valeur humaine de l'homme de ses rêves : It's so easy to laugh / It's so easy to hate / It takes strength to be gentle and kind, il admire à quel point son interlocuteur reste gentil avec lui alors qu'il pourrait rire de lui. Mais malheureusement si l'amour est naturel et réel, il ne pourront pas le partager ensemble : Love is natural and real, but not for such you and I, my love. Et la chute n'est que plus dure.
La quatrième chanson traite simplement de la solitude de Morrissey, qui n'a jamais trouvé "bague à son doigt", l'essentiel de son existence étant voué à être seul Never had no one ever, qu'il déclame sur plusieurs secondes. Sorti de chez son ami, il ne se sent pas le courage de prendre les choses en main et de déclarer son amour en y retournant, restant face à lui même. La quatrième chanson parle d'unes escapade dans un cimetière par un après-midi ensoleillée, au cours duquel il se confronte à celui qui l'aime, et est d'abord déçu par son manque d'originalité lorsqu'il déclame des vers qu'il a pompé sur un poète. Moz' fait s'affronter deux visions de la poésie : la rigoriste et classique avec Keats et Yates avec la sienne, celle de Wilde, prétendant que celle-ci gagne sur la première, ce à quoi son interlocuteur répond sensiblement désintéressé Sure. Big Mouth Strikes Again traite de la frustration qui se traduit en violence : devant l'incompréhension de l'objet de sa flamme ardente, Morrissey a fini par s'emporter et trancher avec des mots secs, il raconte alors à peu près n'importe quoi pour expliquer que des fois il ferait mieux de se taire, sinon il finira comme Jeanne d'Arc, au bûcher. The Boy With The Thorn On His Side semble aborder un pan de la réalité en joignant les deux personnes par un lien "mystique", représenté par la "corne" : Morrissey tente de convaincre que le regard des autres n'approuve pas ce qu'il ressent, mais que le côté spécial et unique de son amour devrait lui permettre d'échapper aux plates et courtes considérations de la masse.
Vicar in A Tutu permet au personnage de montrer qui n'est pas le seul à aborder la vie "différement" : il ne juge pas les autres et admire le courage d'un vicaire pour être vétu en permanence d'un tutu, c'est à peu près du grand n'importe quoi, mais ça lui permet de dire qu'il peut s'accoutumer à toute sorte de fantaisies, puisqu'il en est le living sign, la preuve vivante. Arrive ensuite There Is A Light That Never Goest Out. Sommet de l'album et des Smiths tout court, ce morceaux fonctionne parfaitement bien puisque le héros prend enfin le courage de demander : Take me out, tonight, because I want to see people and I want to see life, ce qui n'est qu'un prétexte pour s'approcher de celui qu'il aime : And if a double decker bus crashes into us to die by your side is such a heavenly way to die. Ce n'est cependant pas encore le moment et il n'ose pas demander : And in the darken underpass I thought "Oh God, my chance, it come at last! But a strange fear gripp me and I just couldn't ask.... Le rappel du rideau est tiré par une des plus belles chanson des Smiths : Some girls are biggers than others certains diront qu'il s'agit de décrire si certaines filles sont plus "belles" ou disons, "mieux foutues" que d'autres, je pencherais cependant plus pour une sorte de message de consolation, où le héros dit à l'homme qu'il aime que si la femme est partie, ce n'est pas grave puisqu'elle ne valait pas grand chose et qu'il trouvera mieux, espérant secrètement qu'il soit amoureux de lui : Send me your pillow, the one that you dream of, and I'll send you mine, afin de pouvoir enfin comparer leur rêve et déclarer enfin sa flamme.
Je ne sais pas si ça tiens la route, mais qu'est-ce que j'adore ce groupe.
Créée
le 31 juil. 2015
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