Il existe des œuvres qui touchent en plein cœur de manière tellement intense lors de la première écoute qu’on sait instantanément qu’on sera poursuivi à vie par le souvenir du dépucelage auditif.
Thick as a Brick en fait partie. Un morceau de quartante-deux minutes m’avait déjà complètement retourné en trois minutes. Ces beaux arpèges, cette voix mélodieuse et nasillarde, cette flûte traversière qui ajoute un soupçon de conte à ces paroles un peu maussades, et surtout ce thème, appellons-le refrain, qui aggripe le cœur et l’âme pour s’y graver à jamais, tout ce motif musical merveilleux qui précède le « To be thick, as a brick », tout cela m’a mis en apothéose esthétique et sensorielle, je n’oublierai jamais !
Et le plaisir est toujours intact, impossible de ne pas hurler ce refrain, des années plus tard, toujours aussi grisé par le plaisir issu de cette mélodie.
Thick as a Brick, c’est tout ça, mais aussi un voyage musical rempli de rebondissements, de tensions et d’apaisements, le tout dans une chanson unique et cohérente de quarante-deux minutes.
La piste réussit le tour de force de ne jamais lasser l’auditeur. La virtuosité et la folie de Ian Anderson à la flûte, sa voix distinctive et envoûtante, l’écriture perturbante et les longs passages instrumentaux, intenses et énergiques pour certains (cette batterie qui devient plus folle que la flûte), plus doux et atmosphériquespour d’autres (le piano et la guitare qui apaisent subtilement), œuvrent à la qualité de cet opus.
Thick as a Brick m’a accompagné lors de longs moments de solitudes. Alors que j’errais sans but dans les rues, le son magnifique de ce morceau m’accompagnait à travers les écouteurs, me permettant de passer quarante-deux minutes moins insupportables. J’aime d’amour cet album.