Le parcours de Sia impose le respect dans le sens où elle a lutté une vingtaine d'années avant d'obtenir enfin reconnaissance mondiale. Nous nous retrouvons, à l'écoute de sa discographie, devant de perpétuels changements d'album en album, passant de l'acid house à ses premières heures avec le groupe australien Crisp à un trip-hop typiquement 90's teinté de Soul sur ses premiers albums solos, pour arriver sur une pop plus folle et joyeuse dès « Some People Have Real Problems » et enfin, plus solennelle avec son célèbre « 1000 Forms of Fears », comme si la Dame s'était cherchée tout ce temps, avait peaufiné son propre style... où plutôt la formule pour atteindre le plus grand nombre.
Car si la reconnaissance mondiale a débuté avec son « We Are Born » en 2010 (mon préféré pour sa candeur et son énergie), c'est réellement le succès de « Chandelier » qui l'a mise sur le devant de la scène (même certains de mes camarades dits « métalleux » en ont vantés les mérites), étant auparavant femme de l'ombre de nombreux tubes à succès comme le « Diamonds » de Rihanna et d'une flopée d'autres morceaux (pour Britney, Maroon 5, Beyoncé, Kylie Minogue, Katy Perry, Shakira, Jennifer Lopez et j'en passe) avoisinant maintenant pratiquement la centaine. Et de toutes ces compositions qu'elle écrit, il faut bien que de temps en temps, certaines soient refusées par les artistes. C'est de là que naît ce dernier album ; « This is Acting ».
On comprend vite le problème qui peut découler de cette nouvelle pièce ; en deux ans, Sia n'a pas eu le temps, ni de se faire oublier, ni de se renouveler, ce qui était quand même une gageure dans sa discographie. On retrouve donc dans ses clips la (très) jeune danseuse à qui l'on attribue souvent le visage de la chanteuse, comme si cette dernière voulait continuer à rester effacer au profit d'autres artistes, une couverture d'album noire similaire à la précédente (sauf que Sia nous y gratifie d'une magnifique grimace, ce qui devrait envoyer cette photo au panthéon des pochettes moches) ainsi qu'une patte musicale dans la continuité de « 1000 forms of Fears »... avec une production encore plus tape-à-l’œil, voire brutale à certains moments, privilégiant le beat et la bass comme le mainstream le veut si bien, la voix de Sia paraissant même criarde à certains moments.
Le tout offre un gloubi-boulga pop presque insupportable sur la longueur pour ceux qui oseront l'écouter en entier, d'un seul coup. Mais encore une fois, Sia est une bonne compositrice, et séparément, pas mal de pistes attirent l'oreille, « Bird Set Free », « Cheap Thrills », « House On Fire » (même la dansante « Sweet Design », qui brise un peu la cohérence de l'ensemble comme « Move Your Body », est sympathique). D'autant plus étonnant qu'encore une fois, ces pistes ont été refusées ; si c'est ça les démos qui traînent dans son tiroir, je suis preneur ! Et rodée comme elle est, sa voix peut alors jouer un fabuleux show de transformiste de piste en piste, sans forcément imiter les interprètes à qui elles étaient destinées... « This is acting », comme c'est précisé.
S'il est moins apprécié que « 1000 forms of Fears », sûrement par lassitude, ce nouvel album n'en est pas moins de qualité quasi-égale, malgré l'absence d'un tube de la veine de « Chandelier » et ses plus d'un milliard de vues. J'ai beaucoup de respect pour la carrière de Sia et ce qu'elle est devenue, c'est de plus en plus rare des compositrices qui imposent leurs pattes dans le mainstream de cette façon, sans se prostituer comme le font la plupart des starlettes pour qui elle écrit, ces corps sans âmes. Espérons juste qu'elle ne reste pas trop longtemps sur ses acquis, sur son succès, qu'elle se renouvelle et nous surprenne de nouveau assez vite.
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