Dans un Ecrin de Lumière, le Bijou Brille
Une guitare électro-acoustique se déploie et les arrangements sautent aux oreilles après le dénuement à l’essentiel de The Pirate’s Gospel. La voix d’Alela Diane aussi prend de l’ampleur, moins intimiste, moins caractérisée. La douceur persiste dans des envolées aériennes qui savent redescendre au ras du sol dans un ballet de tendresse, une belle fraîcheur. Dry Grass & Shadows ouvre l’album sur une invitation à se poser dans l’herbe verte tandis que la chanteuse nous parle de ce qui se cache dans les ombres pour ne pas apparaître à la lumière du jour. Avec une fin ciselée, carillonnante, la songwriteuse ne renie pas son artisanat.
White As Diamonds introduit un violon, c’est superbe, pour qu’Alela pose de légères et profondes vocalises, amples. Sa voix, pleine, danse autour de la mélodie. Accompagnée d’une voix masculine, beau contrepoint à sa légèreté aérienne, elle nous berce d’une triste poésie, et nous parle de racines : le duo dénudé d’Age Of Blue a la simplicité efficace. Take Us Back, a les envolées mélodiques hautes dans le ciel tandis qu’Alela touche les âmes avec un folk mystique, une soul music humble, proche de l’être, minimaliste. Quelque chose qui émane d’une joie intime face aux riches bienveillances de la nature. L’orchestration acoustique, cordes du violoncelle, guitare et percussions, de Mr Brambles sonne alors comme une musique de film, et amène une dimension spectaculaire à l’humilité de sa musique. Un écrin aéré, large tel une bulle d’air, souffle là et brise les murs dans une incantation pure. On a l’impression que soudain la voix se libère au plein air. Sur un battement comme le ressac profond du cœur, Alela Diane retrouve la ronde profondeur de sa voix, assurée et pleine. C’est The Ocean, au chœur presque cristallin. Un contraste saisissant entre la richesse des voix et la discrétion d’une mélodie qui tinte et gémit à la fois.
Retour aux arrangements, To Be Still a des allures de Neil Young dans l’ambiance pastorale : une proximité à la nature, une douce adéquation aux grands espaces ensoleillés. La douceur d’une époque qui laissait le temps de vivre. Puis avec une ligne de chant idéale pour les modulations de voix qu’affectionne Alela Diane, The Alder Trees lance une guitare de caractère sur un arpège de volutes franches, souligné par le banjo, et développe une magnifique ballade folk. On pense là au grand Dylan, dénudé. La mélodie pincée appuie le rythme, les mains viennent claquer l’essence du folk, et Alela Diane envole encore une fois son chant clair. C’est superbe, et si les ballades parfois s’étendent en longueur, quand la concision était la règle sur The Pirate’s Gospel, le talent reste irrésistible.
Every Path pose en boucle des arpèges folk, et la voix est ailleurs, loin. Une voix jusqu’alors inexplorée s’enroule et s’ondule sur une supplique mélancolique. La poésie chante l’amour, douce peine. Il y a de l’apaisement. La promesse du repos. Indéniablement, il y a aussi plus de lumière dans ce deuxième opus d’Alela Diane. Jusque dans cette comptine finale : Lady Divine nous quitte tandis que toujours résonne l’arpège.
L’espoir s’échappe toujours. Il s’envole haut, et libre. « This song for children to sing ».
Matthieu Marsan-Bacheré