Urk (Live)
8.2
Urk (Live)

Live de Nits (1989)

Ce double album live capture les Nits à un moment charnière de leur carrière, celui (le seul) où, après des débuts très new wave, ils approchaient un certain succès commercial, réussissant à conquérir un public plus vaste, international, grâce aux albums « In the Dutch Mountains » en 1987 et « Hat », un mini-album en 88. Ces 2 albums vont logiquement former le gros des setlists de la tournée qui a suivi en 89. Au total, 29 chansons enregistrées à Amsterdam (à domicile), Utrecht et Moscou. Les Nits jusqu’alors un peu obscurs, dépassaient les frontières de leurs Pays-Bas natals pour séduire tout un public européen. Car c’est bien une pop très ancrée dans la musique continentale européenne que nous propose le trio, des polders bataves vers les Balkans, la Scandinavie, les rivages de la Méditerranée en passant par des pays comme la France et l’Allemagne ! Les influences anglo-saxonnes sont toujours là et bien là (Beatles, Leonard Cohen…) mais de moins en moins fortes, au profit d’une musique unique, rigoureusement inclassable, qui n’appartient qu’à eux. C’est ce qui les rend fascinants aujourd’hui encore. « Urk » est peut-être bien la porte d'entrée idéale dans la discographie classieuse mais très vaste des Nits. Il est en effet difficile d’y entrer sans savoir par où commencer, on peut vite être décontenancé et laisser tomber, chaque album ayant en plus ses propres ambiances. Alors avec « In the Dutch Mountains », ce « Urk » est une mise en bouche fantastique.

Sur ce disque, figurent ensemble pour la première fois les mini-tubes issus du mini-album « Hat » et ceux de l'album précédent, In The Dutch Mountains. A savoir, "The Train", "JOS Days", "The Dream", "In the Dutch Mountains", « The Bauhaus Chair » (j’adore celle-ci !), qui deviendront jusqu'à aujourd'hui les favorites des fans lors des concerts, des chansons magiques, entraînantes et incroyablement originales...Des pures merveilles de pop racée et mélodique qui puisent leur inspiration dans tout l’héritage musical européen, de la pop à la musique classique et contemporaine voire folklorique ! Des chansons dont les paroles mélangent les langues aussi, en anglais majoritairement, mais parfois en italien, français et allemand ! Quant aux un peu plus anciennes, "Nescio", "Adieu Sweet Bahnof", "Bike In Head", ou "Home Before Dark", elles complètent ce magnifique répertoire en forme de work in progress, le groupe laissant une part à l’improvisation, mélangeant instruments traditionnels et électroniques. Leurs débuts sont par contre logiquement oubliés, leurs morceaux new wave ne correspondant plus vraiment à ce que faisait le groupe à ce moment-là. Le plus extraordinaire, c’est que pratiquement tous ces titres que je viens de citer figurent encore parmi leur setlist et sont acclamés par le public, preuve de leur solidité et de leur capacité à évoluer. Ils remodèlent leur répertoire, lui apporte un sens inédit de l'espace et de la mise en son, se débarrassent définitivement du côté un peu raide et arty qui persistait jusque-là.

Un groupe dont la maîtrise scénique devient phénoménale, variant les ambiances, parfois à l’intérieur même d’un morceau, embarquant avec lui le spectateur (et auditeur) dans une sorte de voyage immobile, dans son univers étrange, subtil et onirique où l’on croise des personnages, des lieux, des objets dont on n’est jamais tout à fait sûr de ce qu’ils font là, ni même s’ils existent réellement ou si c’est de la pure fiction. On sent le public attentif et suspendu, comme fasciné par la prestation. La voix chaude et puissante de Henk Hofstede, très « lenonienne » et parfois rappelant Elvis Costello, et son jeu de guitare acoustique, le toucher subtil, exceptionnel, du batteur percussionniste Rob Kloet, enfin le jeu de sorcier fou du clavier Robert Jan Stips (essentiel au son des Nits car le piano est l’instrument central de leur musique, on s’en est rendu compte lors de son départ en 1996), les silences qui enrobent la musique, l'humour, la mélancolie font de ce disque à la pochette en noir et blanc un must. L’ambiance live est parfaitement retranscrite grâce à la qualité de l’enregistrement. Assister à un concert des Nits n’est jamais comme assister à un concert quelconque, les fans le savent bien, certain(e)s les suivant depuis plusieurs décennies.

Par bien des aspects, cet album est un sommet de leur discographie, au-moins de leur 1ère période, s’achevant sans doute avec le départ pour quelques années de Robert Jan. En 92, ils ont sorti une autre pure merveille en studio, « Ting » et lors des années sans Stips (96 à 2003), je trouve leur discographie toujours intéressante mais plus éclectique, plus aventureuse et moins évidente à aborder. C’est après le retour de Robert Jan qu’ils ont sorti à nouveau des chefs d’œuvre dont « Les Nuits » en 2005, d’une beauté à pleurer. Et en 2024, le trio a fêté ses 50 ans de carrière par un mini-album sublime « Tree House Fire » et une tournée formidable où les années ne semblaient pas avoir de prise sur leur plaisir de jouer et leur énergie. Lors du concert de Paris, Hofstede est arrivé sous une ovation debout de la salle, surpris et nous a dit en français parfait : « Les Nits et Paris sont des mots qui vont si bien ensemble ! ». Des 2 côtés de la scène, des micros étaient tournés vers le public, signe que le groupe s’apprête peut-être à sortir un live de cette tournée anniversaire🤞 ! Ce serait un très beau cadeau pour compléter ce « Urk » jusqu’ici unique live de leur carrière. Un indispensable tout simplement.

JOE-ROBERTS
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le 25 févr. 2025

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