Voyage
5.7
Voyage

Album de ABBA (2021)

J'aime beaucoup ABBA, et je le dis très sincèrement. Ils représentent en quelque sorte les grandes heures de la Pop. On retient surtout leurs tenues kitsch et les sonorités datées, pour ma part le groupe m'évoque surtout des arrangements aux petits oignons, des harmonies vocales parfaites et des mélodies en or massif.


Alors comment dire, lorsque j'apprends qu'un nouvel album va sortir quarante ans après The Visitors (le premier album Pop masterisé en numérique spécialement pour sortir en CD), je suis à la fois enthousiaste et sur mes gardes. On ne va pas se le cacher, le but de cet album c'est avant tout de se faire de l'argent, d'avoir un produit qui vienne soutenir une série de concerts en hologrammes à Londres. Le groupe ne s'en cache pas du tout en interview : les paroles sont de l'ordre de la fiction, il y a un fond de tiroir dans l'album, au départ il s'agissait d'en écrire seulement deux nouveaux titres pour le spectacle, Benny et Björn ont bossé sur les chansons de leur côté puis ont appelé les filles pour chanter, et ce sera le dernier album du groupe. Ça ne part pas très bien dit comme ça, mais les deux singles ont rassuré pas mal de gens : c'est du ABBA pur jus, facilement reconnaissable, avec des voix qui ont vieilli oui... Mais du ABBA quand même.


J'ai donc entamé l'écoute de l'album en acceptant tous ces pré-requis qui augurent plutôt un mauvais disque qu'un bon disque. Et je vois bien que la réception de l'album est assez mitigée, certains le trouvent ringard voire caricatural, d'autres trouvent que ce n'est en rien gênant puisque certains groupes produisent le même genre de musique depuis 40 piges sans que ça ne pose problème à personne. Et puis l'absence de gros tubes n'est pas bien grave non plus parce que vous comprenez, c'est un album, pas un best of (je trouve assez triste de penser de la sorte mais admettons).


Ah c'est sûr hein... Mais bon Arrival c'était quand même un concentré de tubes, et puis les attentes musicales sont différentes entre un groupe qui a sorti pratiquement le même disque tous les 3-4 ans pendant 40 piges et un autre qui n'a tout simplement rien sorti dans ce laps de temps. J'avoue que pour ma part je m'attendais à ce qu'ils donnent à peu près tout ce qu'ils ont du côté de la composition, qu'il y ait au moins un titre digne des tubes d'antan. À la place j'ai eu droit à des morceaux qui ont du potentiel qui va être gâché par des détails, des trucs tout bêtes qui en s’additionnant commencent à peser un peu sur la balance.


Les quarante ans depuis The Visitors sont à l'origine de tous les problèmes du disque à mes yeux. Il faut que je parle de la production parce que je la trouve assez imparfaite. Oui les arrangements sont toujours soignés, mais les choix de sons de clavier ou de batterie mamma mia (si vous me permettez la référence), la place des voix au mixage, tout ça donne une odeur de naphtaline à l'album qui perd énormément en patate. D'ailleurs je suis à peu près sûr que des claviers d'époque ont été réutilisés, mais ils ne sonnent pas comme sur les anciens disques à cause de la façon dont cet opus a été enregistré et mixé qui diffère pas mal des albums les plus connus du groupe.


Je comprends que les voix des filles soient moins belles qu'il y a quarante ans (et qu'elles étaient belles ces voix), qu'il a fallu faire un peu de retouche ici et là en post-production, mais si on retrouve bien les harmonies vocales qui ont fait le succès du groupe, on sent que tout ça est filtré pour que les défauts s'entendent le moins possible. Ainsi, on entend quasiment pas la différence entre Just a Notion dont la majorité des prises vocales datent de 1978 et les autres morceaux parce que les voix sont un peu lointaines au mixages, avec un coup d'égaliseur un peu étrange dessus qui au lieu de donner un coup de jeune aux prises actuelles vont plutôt donner un coup de vieux aux prises de 78.


Le temps qui passe a quand même permis aux paroles d'être un peu mieux écrites, le vocabulaire est plus étayé que dans les années 70 et ça parle de souvenirs, d'histoires d'amour terminées, je trouve ça cohérent avec la moyenne d'âge des membres du groupe et même si ce n'est toujours pas du grand art, c'est plutôt pas mal de ce côté-là.


Parlons un peu plus en détail de certains titres maintenant. I Still Have Faith in You est une ballade, peut-être un peu longue, mais qui marche bien en tant que chanson d'ABBA. Il y a des envolées de partout, une montée en puissance, sans être la compo de la décennie c'est un beau titre pour ouvrir le disque.


When You Danced with Me est aussi une bonne surprise. Il y a des influences folk et celtiques qu'on ne retrouvait pas tant que ça dans les morceaux d'ABBA auparavant, mais qui donnent lieu à de belles harmonies et la méodie est vraiment efficace.


Don't Shut Me Down était un très bon choix de single parce que la progression du morceau est faite pour donner un sourire aux lèvres qui va s'élargir au fil des minutes à l'auditeur. Je ne sais pas bien comment l'expliquer autrement. Le titre commence doucement, il y a ces quelques notes qui emplissent tout de suite notre cerveau de nostalgie, on part sur un couplet où ça monte, ça monte, et on arrive au refrain. Le refrain de Felicita par Al Bano & Romina Power. Je suis étonné qu'ABBA ne se soit pas encore pris une plainte pour plagiat dans la tronche parce que les similitudes entre les deux mélodies durent assez longtemps, presque 7 mesures au compteur jusqu'à ce que la mélodie digresse pour faire comme si de rien n'était. Ça donne d'ailleurs un refrain bien trop long pour se terminer en eau de boudin, mais comme le tempo est proche de Dancing Queen et que la mélodie est testée et approuvée avec ce plagiat sans subtilité, ça marche bien.


Keep an Eye on Dan est vraiment chouette aussi. On sent le successeur de Gimme ! Gimme ! Gimme ! qui ne s'assume pas suffisamment, avec les arrangements un peu trop old school pour vraiment en faire un tube. Bon, les quelques notes de piano de S.O.S. pour terminer le morceau je trouve ça un peu mal venu mais pourquoi pas. Après tout c'est pas une œuvre pure et dure, c'est un produit qui est censé plaire aux fans et raviver une ABBA mania chez les jeunes.


Le reste de l'album, ce sont des ballades. De jolies ballades c'est sûr, mais rien de bien renversant malheureusement.


Honnêtement, le groupe a sauvé les meubles, on sent qu'ils ont fait ce qu'ils ont pu et ils ont respecté leur public dans le sens où ils ont fait ce qu'on pouvait attendre d'eux. Le résultat est plutôt honnête, mais je suis quand même déçu de la production hors de propos en 2021 et qui ne parvient finalement pas à reproduire leur son d'antan.

GuillaumeL666
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le 7 nov. 2021

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Guillaume L.

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