Gainsbourg vu de l'intérieur
PUTAIN !! Mais qu'est ce qu'il faut leur filer à ces cons ??!!
RIEN, putain !! J'ai rien vendu !!!
Moins qu'l'aut' sac de Sheila et ses rois mages à la con.
Moins que l'aut' grenouille de bénitier, ce tue-l'amour et sa coupe de gland ridicule, putain de Mireille Mathieu !!
Ou même ces deux abrutis de Stone et mes couilles qui font semblant de s'aimer pour vendre des disques.
PUTAAAIIN !!! J'avais tout mis dans ce Melody.
Ils avaient jamais entendu ça dans ce pays. Pays de cons !!
Une musique toute neuve, que j'avais bosser dans ses moindre recoins, ne laissant rien au hasard, que j'avais poli amoureusement. Des textes comme ils n'en entendront pas de sitôt, des mots anticipateurs, de la modernité jetée sur du papier.
Moderne, trop moderne pour leur cerveau asséchés par les conneries dansantes et incessantes de l'odieux Claude François.
Ils comprennent rien, ils veulent pas comprendre. Ils font pas d'efforts. Ils bouffent c'qu'on leur file à bouffer, sans réfléchir. Il avait raison l'aut' grand cigare de Général : Les Français sont des veaux.
Ils comprendront peut-être plus tard, trop loin pour eux. Leurs mômes pigeront, eux. J'en suis sûr.
J'me remet tant bien que mal au boulot. Je cherche, je réfléchis.
J'regarde c'qui s'fait autour de moi, en France. De la merde !
J'me casse le cul depuis toutes ces années alors qu'il suffit de faire de la merde pour faire un peu de pognon.
Alors voilà, j'l'ai trouvé mon idée.
J'vais leur laisser faire de la merde, mais moi, j'vais en parler. Ils comprennent que ça.
Du scato, du regressif, ils pourront mieux l'appréhender le Gainsbourg, ce sera plus facile.
Du "Paméla popo", "Des vents, des pets, des poums", des "Hippopodame".
Du grossier, du vil, mais du beau, nom de Dieu !!
Parce que moi, la merde, je peux la rendre belle !!
Parce que rimer, je sais c'que ça veut dire. Parce que les mots m'appartiennent, ils sont à moi, j'en fais c'que je veux, j'leurs fait dire c'que je veux. Parce que du travail, il y en a. Sur chaque phrase. "Par hasard et pas rasé" et ses allitérations, "Sensuelle et sans suite" et ses rimes onomatopiques, hein ?!..Du boulot !!!
Trop !! De boulot, de clopes....d'alcool !!...TROP !!
Le coeur ! Aïe !! Il a lâché !!! Crise cardiaque !
J'ai eu peur. Très peur. Mais j'ai réagi.
J'ai doublé ma consommation de clopes et d'alcool. C'est ce que j'leur ai dit sur mon lit d'hôpital aux journaleux.
J'ai l'impression que Gainsbourg est mort et qu'un autre est en train de prendre sa place. Le même que moi mais en pire. Un personnage. Encore plus débridé et auto-destructeur. Une image d'artiste maudit, comme un reflet dans un miroir déformant.
Etrange comme sensation !
J'ai bouclé mon album.
J'ai écrit une chanson, une dernière chanson pour cet album.
"Je suis venu te dire que je m'en vais" inspiré du maudit Verlaine.
Putain de crise cardiaque, j'ai eu peur.
J'veux pas lui dire que j'm'en vais à Jane...J'veux pas...Pas maintenant !
* l'intégrale des critiques des 16 albums de Serge Gainsbourg ici : http://www.senscritique.com/liste/Initials_S_G/309866