wetdream
8.1
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Album de Willy Rodríguez (2023)

Les fêtes d’hiver approchant, j’ai envie de revenir sur l’album qui aura le plus marquée mon année 2024. Un album qui, je tiens à le préciser, m’a été révélé par mon cher éclaireur Lupra (meilleur pourvoyeur de recommandations musicales). Wetdream, paru le 24 décembre 2023, a été un cadeau de noël exceptionnel pour la scène rock indé et pour moi l’occasion de découvrir un groupe qui ne me quittera plus.


Disons-le tout de go, Willy Rodriguez est un peu mon nouveau Car Seat Headrest (oui j’en réfère souvent à Car Seat Headrest, mais que voulez-vous, ils ont tellement marqué les gens qu’on ne jure que par eux).


Willy Rodriguez est à peu près comparable au groupe de Will Toledo, et en même temps complètement différent. Oui c’est aussi du rock lofi au mixage brouillon, oui c’est énergique et teenage, oui c’est plein d’inventivité et de mélodies immédiatement accrocheuses, mais la comparaison s’arrête là.


Le groupe développe quand même un style bien à lui. Un ton plus espiègle, des sonorités plus exubérantes, un vrai côté « sale gosse » qui s’amuse à balancer des mélodies rapides et dingues, une sorte de noise-pop au mixage bourdonnant, mais la chose est peut-être plus vraie pour leurs précédents projets là où Wetdream emprunte une autre voie.


Ce qui m’a immédiatement plu chez ce dernier c’est d’abord sa façon de faire l’écart entre un teenage rock malicieux et un son presque…féérique (oui c’est le seul mot qui me vient à l’esprit). J’étais étonné de cet aspect « rock de morveux » auquel venait se mêler des compositions douces, en apesanteur, qui créent un autre tableau – un peu à l’image de cette pochette magnifique. Une musique apaisante qui tient presque de la berceuse fantasmagorique. Et c’est probablement la première grande force de cet album. Il arrive à naviguer avec un grand naturel dans le genre qu’il se façonne. L’instrumentation est précieuse, les guitares folk et les banjos peuvent faire irruption pour créer des moments d’une mélancolie touchante avant de rebasculer vers un son plus rugueux, parfois carrément criard. L’album joue beaucoup de sa capacité à sauter d’un ton à l’autre pour qu’aucun morceau ne soit jamais attendu. Et rien que ça c’est déjà fabuleux pour moi. J’aime qu’un album me fasse voyager de cette manière.


Ensuite, une fois qu’on a mieux assimilé l’album, on s’attarde sur son étonnante structure. Certains morceaux sont très courts et constituent des sortes d’interludes instrumentaux (magnifiques d’ailleurs). Comme des parenthèses de velours qui nous tombent dessus sans prévenir. Ecoutez par exemple *falling asleep on the phone* ou *it merely marches forward*. Et à côté de ça l’album développe deux titres respectivement longs de 10 et 20 minutes : les chansons Wetdream et Revisited.


Difficile pour moi de parler de ces deux morceaux sans abuser des superlatifs… Je n’aurais juste pas les mots en fait. On a là des sommets de rock. Des compositions progressives sans l’être vraiment, puisque chacune d’elles comportent plusieurs phases mises bout à bout plutôt que rattachées les unes aux autres, mais qui créent des montagnes russes émotionnelles. Comme le dit très bien l’une des rares reviews trouvables sur le net, ces morceaux nous offrent « des pics et des vallées ». C’est le terme juste. C’est au sein de ces morceaux que Willy Rodriguez expérimente le plus. Le morceau éponyme est un exemple phare : partant d’une douce balade pop, il vire à une sorte de Weezer-like avec grosses guitares qui tâchent, avant de se calmer vers du down-tempo apaisé pour revenir plus fort vers un truc indescriptible à base de grosses drums sur-accélérées. Et le morceau évolue ainsi sur 10 minutes aléatoires où tout y passe, sans jamais que les musiciens n’ait peur de l’excès. Je trouve ça fou. Fou mais d’une dynamique imparable.


Bref ! Tout cela fait de Wetdream un album à la proposition unique. J’insiste. Pour moi en tout cas c’est un album incroyable qui me touche énormément. Probablement le plus bel album de rock lofi depuis How to Leave Town de Car Seat Headrest. J’espère que le temps fera de Wetdream un futur classique du genre qu’on aura envie de citer.


Alors, assez vite j’ai eu besoin de savoir qui se cachait derrière cette musique. Si l’album a plu dans la sphère indé, il n’est pas si aisé de trouver des informations solides sur ne serait-ce que les membres qui composent ce groupe.


Il faut chercher du côté de Friends House Record, petit label crée par une bande de jeunes musiciens inconnus mais ultra productifs qui réunit aujourd’hui une bonne cinquantaine d’artistes. Et il semblerait que Willy Rodriguez soit justement la réunion de trois artistes du label : Midwestern Roadkill, Star Starer et Carter C.


Mais le plus étonnant pour moi a été de tomber enfin sur le visage de ces musiciens : des mecs tout jeunes qui ressemblent à un groupe de lycée. Littéralement. Et personnellement ça m’étonnera toujours de voir que derrière des musiques riches d’idées et de maîtrises comme peuvent l’être par exemple celles de Car Seat ou bien de Vylet Pony (que j’ai enfin accepté d’écouter récemment) il y a des personnes qui ont l’air de tout sauf de rockstar. Des jeunes gamins communs, qui cachent leur visage, ou bien se cachent derrière des avatars, mais des gamins non seulement talentueux et qui parviennent en plus à réellement créer. J’entends par là, à proposer des nouvelles formes de pop et de rock rafraichissantes, à prendre des risques pour expérimenter des projets inédits.


Preuve s’il en fallait une qu’on peut croire en la jeunesse et que le rock n’est définitivement pas mort.

-Alive-
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il y a 2 jours

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