Si Placebo s'avérait un premier essai prometteur, Without You I'm Nothing est une véritable réussite. En matière de rock alternatif, on ne pouvait espérer meilleur album en cette fin des années 90. On peut d'ailleurs le classer parmi les indispensables du genre, d'autant qu'une réelle identité s'en dégage. Le titre éponyme porte bien l'ensemble : des vers sincères, une guitare distordue, batterie et basse accompagnant le tout, sans fioriture.
Pure Morning est un morceau d'ouverture quasi-parfait. Le chant est idéalement placé, et le "main riff" fait de ce titre un des standards du groupe. Dans le registre des standards, on peut aussi ranger Every You Every Me, l'un des tubes phares de Molko & consorts, ayant notamment servi à la BO de Sexe Intentions. Brick Shithouse, Scared Of Girls, Allergic et l'instrumental Evil Dildo (piste cachée) sont plus agressifs, mais on y retrouve l'identité de Placebo : des textes ambigus entonnés par une voix nasillarde, sur fond d'urgence. Mais le trio britannique montre aussi sa capacité à créer de superbes mélodies, notamment à travers Burger Queen, Ask For Answers et My Sweet Prince, trois petites perles. You Don't Care About Us peut paraître de trop à la première écoute, mais à force d'aiguiser son oreille sur celle-ci, on se rend compte qu'elle a sa place dans cet opus, grâce à son riff saccadé et son sentiment de frustration qui se veut omniprésent. Summer's Gone, balade pop, est agréable, mais c'est peut-être cette dernière, qui finalement, se montre en deça des autres chansons.
Pour son deuxième essai, Placebo a donc livré son meilleur album jusqu'à ce jour. L'émotion et l'arrogance s'y mêlent, effectivement, avec un réel brio. Les structures, simplistes mais efficaces, caractérisant la musique du groupe, repousseront certainement les amateurs de technique.