Dans le dvd du making-of de cet album (I'm trying to break your heart), il y a une scène où l'un des producteurs du futur album demande à Tweedy s'il sera dans la même veine que Summerteeth (leur opus le plus commercial). Le chanteur a un air gêné et esquive un peu la question. Il sait très bien que les nouvelles maquettes vont être un séisme pour les auditeurs.... ce qui conduira les producteurs à le refuser et Wilco à le produire lui-même (et d'obtenir le plus gros succès de sa carrière). Il suffit d'écouter la chanson initiale pour comprendre l'importance du virage opéré par Tweedy : que rien ne sera plus jamais comme avant. Une ouverture bruitiste de près d'une minute est le sas imposé pour accéder aux premiers mots du chanteur et à la mélodie de la chanson.
Cette évolution, certainement en relation avec les problèmes rencontrés par Tweedy, enclin à de violentes migraines, a également dû accélérer le départ deJay Bennett, adepte de la mélodie pure, qu'on ne retrouve pas ici. Qu'on ne s'y trompe pas : Yankee Hotel Foxtrot contient aussi de très belles chansons mais elles sont parfois enveloppées dans une gangue de sons tourmentés qui ne permet pas à l'auditeur de les écouter avec une totale sérénité. C'est le cas notamment de Réservations, chanson de clôture, qui, après un court développement d'une grande beauté, se prolonge de murmures musicaux sur près de 5 minutes.
Au final, il s'agit d'un album aux textes souvent sombres, porté par la voix magnifique du chanteur et une ambiance souvent désenchanté. Pour le groupe et les fans, cela reste celui qui a définitivement lancé la machine et dont Tweedy n'a de cesse d'en reprendre une grande partie à chaque concert, comme une reconnaissance éternelle à cette cuvée 2002 qu'on peut cependant trouver un peu surestimée