Après moult teasing, au point où ils se sont senti obligés de s’excuser pour l’attente sur la track finale, la légendraire mixtape des artistes (musicaux / vidéos) et memeurs du web 2.0 Pandrezz, Kronomuzik et Ronare est enfin entre nos mains ou plutôt entre nos oreilles. 41 tracks qui s’essaient à tous les genres, de l’humour, du banger, 1 heure et 42 minutes à se mettre sous la dent ou plutôt derrière les tympans c’est quoi ces expressions bizarres.
Les premiers extraits publiés m’ont purement et simplement fait transpirer de la bouche, on dit baver je crois avec un “Nous y sommes” d’ouverture de projet à l’instru percutante, au flow calibré qui se baladait sur toutes les latitudes du globe et un texte assez rigolo, tout ce qu’on pouvait aspirer du projet validé en un seul son. Un featuring avec Squeezie déjà supérieur à toute sa carrière musicale (malgré un abus bizarre des backs et le vol de titre à Orelsan) doublé d’un pastiche des Daft Punk hyper convainquant musicalement. Ce préambule à été parachevé d’un Violette et Citronnelle d’Alkpote ridiculement kitsch, donc parfait (j'espère que la version mignonne de Marshelle est toujours dans les cartons), à l’instru électro encore une fois renversante et au clip succulent (mon psy : Gangster Feldup n’existe pas il ne peut pas te faire de mal). Je ne parlerais même pas du Maman laché le jour de la sortie avec le clip du mastermind de l’animation, qu’est-ce qu’il se passait bordel ? Un projet musical du web allait-il vraiment nous faire décoller de notre chaise ? Une mixtape infinie qui arriverait à mettre les curseurs au maximum autant au niveau de la production musicale et de la solidité des propositions qu’au niveau de la créativité ?
Qui en doutait réellement de toute façon ? Bien entendu la tape qui nous a été livrée ce 17 juin est un plaisir caramélisé : la sincérité faite note et les trois bougres (accompagnés d’une équipe de choc qui renverrait les Expendables à la cour de récréation de l’Ehpad) n’ont absolument pas rechigné et ont mis une vraie personnalité dans la quasi totalité des sons. Comme dans les extraits initiaux la musicalité est la plupart du temps exemplaire, elle n’hésite pas à se promener à travers les styles en allant chercher du saxo jazzy et des solo de guitares crédibles. Je ne pense pas qu’il soit possible d’écouter l’album sans lâcher un véritable éclat de rire, surtout avec des pépites comme l’Interlude français, N-mot ou les joviales punchs présentes dans tous les sons. J’ai eu mon kebab Banger Humour Oignon, tiens chef prends mes 6,50€ je chope une boisson et je vais m’installer. Les pastiches d’artistes sont solides (Koba la D, Freeze Corleone, Jul sur l’irréprochable Lezgongue) au point où on se demande si ils ne faisaient pas en fait réellement partie de la liste infinie de featurings improbables, les références pleuvent comme les chats et les chiens en Angleterre (vous le verrez rien qu’à la tracklist…) et on est loin d’un simple bal des références du web… et même si ça avait été le cas ça aurait pas été si gênant tant on est transporté par la musicalité et le flow. Mais non ! Les mecs ne se sont absolument pas contenté du service minimum et n’hésite pas à lâcher des dingueries sorties des tréfonds de leur coeur, de la pop du futur avec Light it up, Feldup qui nous khalass sur Back Home, enfin y’a de la prod en anglais quoi c’est ouf : il y a eu un vrai plaisir dans la constitution de la tape et c’est tellement communicatif ! L’apogée du projet étant à mon goût atteinte avec le Tony Hawk de BigFlo que j’ai réécouté au moins 40 fois (sans rigoler) le premier jour. Ça commence sur un rap qui claque déjà très solide, pour partir sur un espèce de chant appairé à une pure dinguerie en guitare électrique. La voix de BigFlo chancelle et est insuffisante tant il sort de sa zone de confort pour nous lâcher une perle comme ça : bordel mais c’est tellement beau ? Zénith des instrus truculentes, des concepts de sons vraiment drôles et surtout de la créativité des artistes : bravo à eux 4 d’être aller aussi loin là dessus.
Au départ la zizi caca mixtape est apparue pour beaucoup comme un simple projet musical du web comme il en sort en boucle en ce moment et point barre mais non, à la sortie des extraits (et à l’annonce des QUARANTE ET UNE TRACKS. 41 !) j’ai compris qu’il y avait vraiment moyen que ce double album soit un sanctuaire de créativité, d’excentricité, d’expérimentations et en même temps d’aboutissement et de sincérité. Et au final et à mon goût : ça a vraiment été le cas. Bien entendu certains sons sont en dessous du lot, plus monotones, plus lambdas, plus cons. Certains ressemblent même à ceux qu’on fait en 2-3 heures pour rigoler avec des potes. Mais à son meilleur, qui est la quasi-totalité de ses tracks, l’album atteint une apogée de beauté et d’aboutissement de proposition que seule une tape humoristique comme telle pouvait atteindre.
Chapeau bas aux trois artistes ainsi qu’à toutes les personnes qui se sont impliquées dans le projet, c’est vraiment ce genre de surprises qui font qu’on se rend compte de la chance qu’on a d’être en vie.
Né trop tôt pour explorer les galaxies, né trop tard pour explorer la terre, mais né juste à temps pour écouter Bigflo chanter ses tripes, Superflame doubler un interlude autour du N-mot, Alkpote rapper des salaceries sur une électro digne de Yeezus, Le chroniqueur sale débriefer en direct un morceau de la tape… Vous nous avez régalés, vraiment.