Bonsoir possédait de sérieux arguments pour me convaincre de lui offrir un peu de mon temps, et peut-être de mon amour (si affinités).
Déjà, j’aime bien qu’on me dise Bonsoir, surtout après de nombreux et longs mois où on ne voyait plus grand monde le soir.
Je ne connais pas l’auteur, Google me dit qu’il a déjà un beau palmarès dans l’humour et la parodie, c’est un bon point. J’adore son nom, B-Gnet, franchement.
Le contenu a été publié dans la célèbre revue Aaarg !, « bande dessinée et culture à la masse », drôle et mordante, punk et funky. De l’humour pour les grands, pour ceux qui ont toutes leurs dents.
Et dans cet album, B-gnet s’amuse à tourner en dérision quelques grandes figures du cinéma fantastique et horrifique, ce mauvais genre que j’aime tant. Chic, chic, chic.
Mais la poilade tant espérée ne fut pas là.
Une sorcière est condamnée au bûcher mais veut se faire passer pour un magicien, la créature de Frankenstein va à l’école, des créatures gigantesques qui sèment la pagaille sont stoppées par des militaires pas très finauds, un homme revenu à la vie sauvage se prend pour un loup-garou sous l’œil pas très vif de la maréchaussée, et d’autres sont autant de grandes lignes pour définir les quelques histoires présentes.
L’album m’a fait furieusement penser à du Daniel Goossens, et pas seulement à cause de son style, sa plus grande qualité. Ses personnages sont stylisés avec ce qu’il faut de caricature, la juste exagération comique, avec une très belle colorisation, au lavis ou à l’aquarelle. C’est joli, même si ces couleurs douces sont plus printanières qu’angoissantes. Le segment « La gueule de bois » qui se passe de nuit et dans la neige l’exploite bien mieux. Seul « Frankenstein au CM2 » est en nuances de gris, c’est dommage, cela faisait un peu vintage.
Mais pour revenir à la comparaison avec Goossens, c’est le ton général employé qui m’y fait penser. Un humour faussement sérieux, distillé par petites touches, pour un absurde paisible, même si Bonsoir est plus visuel, plus illustratif, quand Goossens sait faire rire juste avec quelques bulles de dialogue.
J’ai d’ailleurs vraiment cru que B-gnet était le pseudo derrière lequel se cacherait Daniel Goossens, mais non.
Les histoires sont un peu trop calmes, l’humour à froid est proposé à petites doses. Les histoires ne faisant que quelques pages, la conclusion est vite arrivée. Et le rire ne prend pas. Quelques idées amusent, mais la reprise de ces grandes figures est un peu trop sage, trop timide. Peut-être même pas assez « Aaarg ! ». Quelques rares strips sont présents, leur concision et leur sens de la chute les rendent déjà plus drôles. Tandis que quelques belles illustrations en pleine page parsèment l’album.
C’est décevant. C’est joli mais c’est décevant. L’album a tout de même la gentillesse de se terminer par « La nuit des gens heureux », évident pastiche des films de Romero, à la différence près, et de taille, que les infectés ne sont pas des zombies mais des gens heureux, collants, encourageants, envahissants, au grand détriment des quelques rescapés qui veulent garder leur « humanité ». C’est peut-être la satire de cette histoire qui lui donne un peu plus d’intérêt, ce dont manquent les autres.