Kurdy, le retour

Avec cette BD Hermann fait aussi fort qu’avec « Un hiver de clown » le précédent épisode. Le scénario, complexe, fait intervenir de nombreux personnages, chacun bien typé. Chacun a ses visées et celles-ci se croisent voire se heurtent.

Jeremiah arrive à Langton en compagnie de Lena. Ils envisagent de se marier. A Langton, ils trouvent une ambiance de fête foraine, liée à l’approche des élections. En lice on trouve Monroe (belle gueule d’homme sûr de lui, sourire dentifrice, etc.) et Atwood. Les deux se livrent une lutte sans merci.

La toute première partie montre deux hommes cagoulés en expédition nocturne dans la prison de la ville. Leur mission : exécuter un homme. Pour eux l’affaire tourne très mal, comme si « on » avait été prévenu de leur venue.
L’un d’eux est abattu alors que l’autre s’échappe. Sans trop de surprise, le lecteur découvre qu’il s’agit de Kurdy. Kurdy toujours aussi casse cou, aventurier débrouillard et gouailleur.

Le hasard fait que Jeremiah aperçoit Kurdy dans la foule grâce à la plume de son casque. Jeremiah apprend qu’un arrêt de mort a été décrété vis-à-vis de Kurdy par ceux qui l’ont recruté pour sa mission à la prison. Le lien d’amitié n’étant pas mort, Jeremiah tente de prévenir Kurdy qui n’en fait évidemment qu’à sa tête…

Cette BD marque le retour (comme un boomerang) de l’ami Kurdy et de sa mentalité de dur à cuire à qui on ne la fait pas. Hermann se plait à décrire un milieu politique complètement pourri. Autant dire que si cela peut révolter, cela sonne également assez juste. Le dessin est encore une fois un régal, même si les ambiances sombres me semblent plus réussies que le reste. L’univers décrit par Hermann est franchement noir. Dans les ambiances colorées de fête, on sent la fausseté de cet apparat. C’est voulu bien-sûr. Toujours est-il qu’Hermann rend bien en BD une ambiance très animée où le lecteur imagine facilement le bruit de tous ces gens qui s’agitent, que ce soit la foule ou les Pom Pom Girls.

Même si ce n’est vraiment pas une innovation de l’album, le goût du dessinateur pour les cadrages cinématographiques saute aux yeux. Exemple remarquable planche 18 où les décors post-apocalyptiques sont particulièrement bien intégrés à l’histoire. Mais aussi planche 26-29-35-37 notamment. L’intérêt est que ce n’est jamais gratuit. Cela permet au lecteur de s’immerger dans l’action. Et de l’action il y en a !

Dialogue savoureux au moment où Jeremiah revanchard retrouve Kurdy « Une dernière chose, accroche-toi ! Je me marie après-demain ! Tu devines qui sera la mariée ?... Salut » ce qui inspire la pensée suivante à Kurdy « … Se marie !... Pauv’ vieux ! Et c’est moi qui est en danger ! » Une autre parole de même inspiration sortira des lèvres de Kurdy à la fin. Il réalise un peu tard qu’il aurait mieux fait de se retenir.
Une BD publiée en octobre 1984. Une vraie réussite.