Un album de transition où Amos, par le jeu des circonstances, découvre un moyen de gagner sa vie, alors qu’il était bien mal en point, toujours en fuite. Celui qui l’a embarqué un peu par hasard (contre la volonté de sa fille), observe rapidement qu’Amos est très à l’aise avec les chevaux. L’homme et sa fille, Stacy jeune blonde mignonne, gagnent leur vie en allant de rodéo en rodéo. Amos s’intègre à l’équipe et se fait rapidement une solide réputation, même si cela ne plait pas à tout le monde. A l’occasion, on lui rappelle qu’il n’est qu’un Indien et qu’il n’est pas forcément le bienvenu dans un univers contrôlé par les blancs. C’est l’élément le plus important de cet épisode qui fait malgré tout 60 planches (la dernière datée du 2-8-1993). Derib se fait un plaisir en retrouvant des chevaux et il se montre très à l’aise pour décrire le petit monde des rodéos (des rodéos où l’on découvre plusieurs épreuves, dont le Barrel Racing réservé aux femmes, ainsi que le Bull Dogging qui correspond à ce qui est montré dans le film brésilien Rodéo). Derib montre également les entrainements et les à-côtés comme les combats de chiens. Erik, l’ange gardien d’Amos lui apparaît furtivement sous les traits d’un clown figurant dans le spectacle qui accompagne les épreuves.
A l’image des chevaux avec qui il entretient un rapport privilégié, Amos est épris de liberté. En trouvant un moyen de gagner sa vie, Amos acquiert un début d’indépendance. Degré de liberté renforcé parce que son employeur lui donne un cheval, Straw Shannon. De son côté, pour marquer son indépendance, Amos décide d’abandonner la moitié de ses gains à son employeur, soit plus que ce que celui-ci lui demandait.
L’album est également marqué par l’attitude de Stacy. Très réticente au début, comme si Amos pouvait menacer sa position, elle finit par éprouver une réelle tendresse pour lui. Si Amos l’accepte parce que les circonstances s’y prêtent, il ne se gênera pas pour la rejeter, probablement en se souvenant de la façon dont elle l’a d’abord traité.
Dans cet album, Derib poursuit sa description de l’ouest américain tel qu’il est devenu, l’ouest profond, celui des cowboys. L’apparition d’Erik est assez furtive, juste avant la fin, mais elle rappelle à Amos qu’il ne peut pas se contenter de côtoyer les wasichous dans cette sorte de cirque. Amos a encore beaucoup de mal à comprendre ce qu’il peut faire de sa vie. Une révélation d’Erik, qui s’est ensuite évaporé dans la nuit, lui a appris qu’il est un descendant de Celui qui est né deux fois et que son esprit l’habite. Une révélation dont Amos ne mesure encore pas l’importance.
La construction de l’épisode est agréable, toujours dans ce style que Derib affectionne, avec des couleurs naturelles et un dessin où l’aspect esthétique ressort, bien qu’il ne soit pas ostensiblement recherché. Encore une fois, le dessinateur utilise son art (sa fantaisie) en utilisant tous les arguments qui sont à sa disposition : le trait et la couleur, mais également l’utilisation de l’espace disponible sur une planche, avec une interaction entre les vignettes (les tailles et formes, très diverses, installant une lecture incroyablement aisée et naturelle, malgré des vignettes très diversifiées en forme. Une nouvelle fois, Derib fait preuve de talent en privilégiant l’action au bavardage.