Les aventures en BD du cimmérien Conan ont été un événement phare de l’histoire de Marvel, et pourtant elles ont failli ne pas voir le jour. Réclamées par le scénariste Roy Thomas, Stan Lee, alors grand manitou de Marvel était sceptique sur le potentiel du barbare face à ses super-héros en collants qui se vendaient par milliers.


Mais quand en 1970 le premier numéro de Conan the Barbarian sort, écrit par Roy Thomas et dessiné par le jeune Barry Smith, ce n’est que le début d’une longue histoire d’amour entre les comics et Conan. Plus de 600 numéros paraîtront chez Marvel entre 1970 et 1999, répartis entre différentes séries et mini-séries. Les deux films des années 1980 leur doivent beaucoup, et les remercient d’ailleurs dans les génériques.


En France, les meilleurs épisodes seront publiés et réedités par la plupart des éditeurs de comics au fil des années : Lug, Artima, Mon Journal, Semic, Les Humanoides associés, Marvel France, Panini, Soleil, etc. Tous ont voulu leur part du Conan.


Il est donc assez difficile de manquer ces épisodes de chez Marvel. Pour L’Étoile de Khorala, il s’agit d’une publication en grand format de l’épisode 44 de Savage Sword of Conan paru en 1979, qui adapte une nouvelle de 1978 écrite par Björn Nyberg et L. Sprague de Camp qui avaient repris le personnage.


L’habitué de ce Conan par Roy Thomas qui a défini ses codes en bandes dessinées ne sera pas dépaysé, le barbare est ce guerrier hors du commun, fier mais pas inconscient, qui roule sa bosse de villes en villes, prêt à louer son épée ou épauler qui se montrera digne de sa confiance. L’homme est un bon vivant, un régulier des tavernes mais aussi sensible aux jolies femmes.


Dans cet épisode, Conan vient échanger une bague qu’il a volé contre des richesses ou des avantages. Mais la personne à qui il souhaite négocier, la reine Marala, est recluse dans une tour, retenue prisonnière par son époux, un roi fantoche manipulé par son cousin. Épaulé de ses derniers fidèles, il va s’atteler à la libérer, obtenir la récompense attendue et peut-être même un baiser ou plus de cette belle reine.


A chaque ville son problème, à chaque royaume ses tensions internes et ses rivalités, cet épisode n’est pas de la plus grande originalité, même si une fois encore la découverte d’un nouveau lieu, avec son histoire et ses traditions étoffe le contexte des pérégrinations du barbare. La malice de Conan permettra de se défaire des embûches et s’il n’a pas le choix il dégainera son glaive. Les rivalités des puissants n’ont qu’un temps, et ne survivent guère face à la force du Cimmérien.


Avec Conan la sorcellerie n’est jamais loin, mais quand le fantastique s’invite, c’est pour un deus ex machina assez classique et bien trop court. Rien à voir avec la superbe couverture signée Earl Norem, ses créatures horrifiques qui entourent Conan et la reine prêts à se défendre vaille qui vaille et ce premier plan saisissant avec le sang coulant de cette hache.


Les pages intérieures sont signées Sal Buscema, petit frère de John Buscema, artiste avant tout célèbre pour avoir imposé sa vision dessinée de Conan, dont il dessinera bien des aventures avec un dynamisme et une présence certaines. Sal n’a pas encore sa maîtrise, son style est assez réaliste mais un peu trop statique, qui rappelle (de loin) le Prince Vaillant de Foster. Pour sa défense, les pages ont été colorisées alors qu’elles ont été publiées en noir et blanc, et cette colorisation forcée se voit, comme ces vieilles cartes postales recolorisées, ce qui rajoute un côté factice à l’ensemble.


Savage Sword of Conan était une revue publiée au format magazine, et donc échappant au Comics Code Authority, autorité moralisatrice et hypocrite qui allait être mise à terre par les années 1970, notamment par les coups de lame de Conan. Le sang grouillant de cette couverture n’aurait pas été permis dans d’autres revues, tout comme certaines scènes de nudité discrètes mais rares pour l’époque. Les intentions sexuelles de Conan sont évoquées à demi-mots mais bien présentes. Il est donc regrettable que l’histoire ici proposée malgré la liberté offerte à Roy Thomas reste assez classique. Ce n’est évidemment pas la meilleure aventure de Conan proposée par Marvel, mais il y en a beaucoup d’autres.


D’ailleurs Conan est à ce point associé à la compagnie que celle-ci a acheté à nouveau les droits du personnage entre 2019 et 2022, avant de ne pas les renouveler au profit d'un nouvel éditeur en 2023. Le barbare cimmérien est donc revenu dans les pages de Marvel pour quelques épisodes, au sein d'épopées plus classiques mais aussi parfois dans des aventures aux idées surprenantes, comme la série Savage Avengers aux côtés de Wolverine, de Punisher ou de Venom. En France, le personnage a été repris par Glénat pour une dizaine de tomes originaux. Conan le barbare n’est donc jamais loin dans le paysage éditorial de la bande dessinée, qui le lui rend bien.

SimplySmackkk
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le 15 juil. 2022

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