De mal en pis par amandecherie
Tout commence lorsque Sherman prend un appartement en colocation avec le couple que forment Jane, dessinatrice de BD, et Stephen, professeur d'histoire. Au fur et à mesure nous apprenons à mieux connaître les personnages qui gravitent autour de Sherman : son meilleur ami Ed, loser aspirant dessinateur de comics, Ray coureur de jupons, ou encore Dorothy, sa petite amie aussi bordélique qu'alcoolique.
Sherman hait son job de vendeur en librairie qui le rend aigri (c'est du vécu !) et nourrit l'espoir d'être écrivain, Stephen et Jane hésitent à s'engager, Ed s'implique dans un combat aux côtés de son patron Irving Flavor, vieil homme détroussé par une major de la BD qui détient tous ses droits. Ça, c'est pour les fils conducteurs qui tournent beaucoup autour du milieu de l'édition, car Alex Robinson développe également tous les petits et les grands événements qui déterminent une vie. Le livre est divisé en anecdotes qui nous permettent de mieux découvrir les personnalités de chacun des personnages. Ainsi, les vies s'entrecroisent, on passe du rire aux larmes, avec le sentiment que c'est simplement et très justement la vie qui se déroule sous nos yeux. Nous avons l'impression de découvrir les personnages progressivement, on ne les voit plus du même œil au début et à la fin de l'ouvrage, il faut dire qu'ils évoluent moralement ET physiquement (il suffit de comparer Stephen au début et à la fin de la BD), trahissant une œuvre qui a dû accompagner longtemps l'auteur qui a réellement chéri ses personnages.
Les chapitres sont en outre entrecoupés de 'planches d'interrogations' où une question est posée (Que dirais-tu à Dieu ? Que veux-tu pour Noël ? Dans quelle série voudrais-tu vivre ?) et chaque personnage y répond à sa manière, révélant davantage sa personnalité.
Il y a de nombreuses références à la pop culture et à la civilisation américaines. Ça s'avère plutôt bénéfique pour élargir nos horizons, même si on regrette de ne pas comprendre toutes les blagues.
Le dessin en noir en blanc est plutôt imaginatif, les mises en page sont originales et diversifiées, c'est particulièrement fort lorsque image et écriture se répondent, par exemple quand Sherman hésite à embrasser Candice, et que tout ce qui se trame dans sa tête est inscrit en un fouillis tandis que les visages des deux personnages se rapprochent.
Et pour clore ce roman graphique sans complaisance, un épilogue touchant où les vies n'évoluent pas dans le sens où les personnages l'attendaient et où le héros n'est pas forcément celui que l'on croit.