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Dans le monde de Ei8ht, quand on voyage dans le temps, on a autant de chance de quitter le présent pour le passé ou l’avenir, que de se retrouver dans la Mélasse. Au sens propre du terme : car la Mélasse est un véritable lieu perdu où atterrissent les égarés des expéditions temporelles. Et c’est là que débarque Joshua, malheureusement amnésique.


Joshua peine même à se rappeler son nom. Les souvenirs de son départ lui reviennent péniblement tandis qu’il s’extrait de son appareil. Un huit écrit sur l’avant-bras lui rappelle qu’il doit pouvoir communiquer avec ceux qui l’ont envoyé là via une radio qu’il a au poignet. Mais la voix, inconnue, qui lui répond se révèle être celle-là même de la personne qu’il va sitôt rencontrer...


D’emblée, des paradoxes temporels, des lieux mystérieux à explorer, et des intrigues multiples et des personnages reliés entre eux par les lois complexes de voyage dans le temps. Beaucoup d’éléments plutôt bien posés, une narration claire laissant un vraie part au mystère et des protagonistes qu’on a pour le moment plaisir à suivre.


Et la couleur - ou plutôt les couleurs - est annoncée de suite, en ouverture du volume : le vert pour le passé, le violet pour le présent, le bleu pour le futur. Et un beigeasse indéfinissable pour la Mélasse. Un code graphique fort sur lequel s’appuie une narration qui permet habilement à Ei8ht de déployer son intrigue.


Les débuts de cette nouvelle série de Rafael Albuquerque - que l’on connaît pour sa collaboration avec Scott Snyder sur American Vampire, ou pour sa participation au renouveau d’Animal Man - et Mike Johnson paraissent ainsi sacrément prometteurs. Pourtant plusieurs éléments s’avèrent poussifs voire paresseux, et ternissent la bonne première impression.


C’est d’abord la Mélasse qui déçoit : un désert, c’est assez pauvre en termes d’imaginaire surtout pour le lieu central de l’action. D’autant que pour le moment son exploration ne révèle pas grand chose de saisissant ou d’original, que ce soit au niveau de l’architecture, de la flore ou de la faune. Présent et passé apparaissent pour l’heure à l’avenant, très génériques, et il n’y a guère que le futur qui titille un peu la curiosité.


C’est ensuite l’intrigue propre à ce volume qui s’avère elle aussi un peu rudimentaire. On sent qu’il s’agit là de lancer la machine, mais le tyran, ses troupes, ou les rebelles comme cachés aux portes de la capitale et en fuite à quelques encablures de là, peinent à convaincre.


Cela manque de densité et de profondeur en somme, de proposition et de prise de risque. Si Ei8ht offre un récit aisément saisissable et plus clair que celui de Black Science, dans un registre et une thématique assez proches, ce dernier s’empare réellement des possibités ouvertes par la science-fiction, ce que manque en partie Ei8ht en demeurant trop sage pour le moment.


Chronique originale et illustrée sur actuabd.com

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le 31 juil. 2016

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