Dans les tranchées, le danger peut venir de partout. Parfois même de ses propres intestins. Pendant que les soldats Berneau et Duprez tombent dans les bras l’un de l’autre en découvrant qu’ils viennent du même village dans les Deux-Sèvres, ils ne se rendent pas compte que leur camarade Bapt, qui est en train de se vider aux feuillées, est tombé à la renverse. Du coup, le pauvre gars finit presque par se noyer dans la chiasse… Un peu plus tard, un autre poilu découvre un soldat allemand assis tranquillement sur un banc dans la tranchée française, tandis qu’un deuxième fridolin se balade lui aussi dans le mauvais camp. Désorientés, épuisés et blessés, ils se sont clairement trompés d’endroit. « Faut vraiment être un boche pour faire ça », rigole le lieutenant français, avant de se rendre compte que cinq de ses propres soldats se sont eux aussi trompés de tranchée après la bataille éprouvante de la veille… Encore un peu plus tard, c’est un autre lieutenant qui se rend compte que les hauts gradés de l’état-major ont décidé de faire preuve d’un peu de fantaisie. Dans sa compagnie, on retrouve ainsi le caporal Latouffe, mais aussi les soldats Cramouille, Lachatte, Prépuce et Foufoune. De quoi faire mourir de rire les Allemands! Quant au soldat Gordel, il est persuadé que le trésor des templiers se cache sous les tranchées des boches. Il décide donc de constituer une équipe pour aller récupérer le butin…
Peut-on rire de l’horreur des tranchées? Oui, absolument! Alors que l’on commémore cette année les 100 ans de l’effroyable bataille de Verdun, l’auteur français Guillaume Bouzard prouve qu’il est possible de raconter des histoires drôles sur la boucherie de la guerre 14-18. Avec « Les Poilus frisent le burn-out », qui rassemble une quinzaine d’histoires courtes prépubliées dans le magazine « Fluide Glacial », Bouzard aborde les mêmes thèmes que Tardi, considéré comme la référence ultime en termes de bandes dessinées sur la Grande Guerre: des soldats qui déraillent, des officiers qui donnent des ordres totalement illogiques, l’horreur de la vie quotidienne dans les tranchées, les petites lâchetés des poilus, les corps déchiquetés… Avec en filigrane la même critique féroce que Tardi sur l’absurdité de la guerre et la bêtise des hommes. Mais Bouzard utilise d’autres armes pour le démontrer. Comme dans tous ses albums, il privilégie l’angle de l’humour grinçant et de l’absurde. Comme le souligne Fluide Glacial, « les Poilus de Bouzard, s’ils frisent le burn-out, ont décidé que leur salut était dans le rire. Un rire de résistance, un rire de la paix au milieu de la guerre qui trouve un écho, 100 ans plus tard, dans notre monde au bord du chaos. Un rire salutaire pour prouver que, même au cœur de l’enfer, le rire peut nous sauver car il sera toujours le propre de l’homme… » A noter que « Les Poilus frisent le burn-out » est présenté comme le premier tome d’une série baptisée « Les formidables aventures des Poilus ». Dans les années à venir, on peut donc certainement s’attendre à découvrir d’autres histoires loufoques sur la vie dans les tranchées. Mais avant ça, Bouzard va d’abord s’attaquer à un tout autre sujet, puisqu’il travaille sur un album de Lucky Luke. Ca promet!
Plus de critiques BD sur mon blog AGE-BD.