Aventure parue tout au long de l'année 1964 dans Pilote et conçue en 92 planches, réparties ensuite sur le précédent album (baptisé pour l'occasion Le Piège espagnol) et celui-ci, La Fin du Faucon noir est un vrai petit bijou d'épopée flibustière.
Ça devient lassant à dire, mais Charlier maîtrise son sujet comme jamais et en un aussi grand nombre de pages, il se permet de développer tous les aspects de celui-ci en prenant son temps pour peaufiner ses effets et les faire jaillir au meilleur moment. On retrouve certes les habituels petits coups de pouce du hasard, mais ceux-ci sont mieux amenés dans le récit que dans d'autres scénarios de l'auteur. Et puis les femmes jouent un rôle majeur et très actif dans l'aventure, ce qui constitue une certaine nouveauté (même s'il est vrai qu'on avait déjà pu apprécier la fourberie de Solange de Breteuil dans Le Capitaine sans nom ou l'intervention d'Aïcha dans Echec au Roy). En tout cas, ça apporte une touche d'attrait supplémentaire à la série, qui prend du coup un tour plus réaliste. Et puis, pour la premières fois, dans l'ultime planche, on voit Barbe-Rouge agir vraiment en pirate sanguinaire et impitoyable.
On pourra cependant trouver un peu facile de toujours placer Barbe-Rouge dans la position de devoir sauver son fils ou inversement, ou de nous proposer une histoire très classique et pas particulièrement originale. Mais le fait est que ça fonctionne très bien et que ce n'est pas dans les moyens de tout le monde de savoir renouveler des poncifs et de les rendre si attrayants. N'est pas Charlier qui veut !
Le dessin de Hubinon s'améliore à chaque tome. De même que la mise en couleur. On peut seulement regretter, comme toujours dans ce type de dessin, une certaine inertie des personnages dans les scènes d'action et des visages trop similaires. Et les couvertures d'Yves Thos sont vraiment laides (le pirate de gauche est le même que sur la couverture de la réédition du Démon des Caraïbes, avec un autre costume et une barbe en plus).
En dehors de ces maigres défauts, il n'y a pas grand chose à reprocher à cette aventure dans laquelle chacun croit posséder l'autre et qui vous rend vos yeux de marmot émerveillé.