Le Nord de la France n’a, de mémoire, guère été mis en avant dans les mangas. C’est donc une première surprise que nous offre la Croisade des Innocents : on démarre dans un petit village du Nord, au début du XIIIe siècle. Ce village n’est pas entouré de camps romains et ne produit pas de potion magique. Il est plutôt pauvre, les riches du coin exploitant la population locale.
Mais il recèle un trésor en la personne d’un jeune garçon, Étienne, qui pourrait bien être un élu de Dieu. Car il semble entendre sa voix et réaliser quelques miracles. Mais sa canonisation attendra : il est l’heure de mettre les voiles pour Jérusalem, dans un nouvel épisode des Croisades. Il n’ira pas seul : d’autres jeunes garçons l’accompagnent. La marche promet d’être longue et on ne donne pas forcément chère de leur peau.
Pourtant certaines rencontres densifient leur effectif, leur offrent quelques ressources bienvenues… pour un peu on se met à y croire. Si ce n’est que la jolie vision des enfants qui libèrent Jérusalem et répandent la bonne parole et les miracles sur leur passage se heurte à certaines réalités : pauvreté, bûcher pour les hérétiques, débauches dans les rangs, cupidité… Ils ne sont pas encore arrivés que déjà Usamaru Furuya sème sur leur route quelques graines qui pourraient vite devenir vénéneuses. On se demande alors qui sont les innocents ? Quelles sont les vraies raisons de la croisade ? La bonté d’Étienne triomphera-t-elle ou sera-t-elle corrompue ? Iront-ils jusqu’au bout ?
Prépubliée dans la (désormais « mythique ») revue Manga Erotics F, la Croisade des Innocents ressemble à un récit pour enfants qui serait peu à peu détourné pour en faire une histoire pour grands, à l’instar du Pinocchio de Winshluss. On ne peut dès lors que frémir en pensant à ce qui pourrait bien encore arriver à notre équipe de jeunes gens… et se demander si tous verront la Terre sainte et en reviendront. Les voies du Seigneur…