"Au fond, les choses ne sont peut-être pas si compliquées."

Il y a une recherche esthétique certaine et cet album-là a pas grand-chose à voir avec une bande dessinée traditionnelle : il s'agit plutôt d'un ensemble de collages sur lesquelles gisent parfois des dessins simples et brouillons. Évidemment, Lino cherche pas à sublimer sa vision du beau avec La saveur du vide (c'est lumineux à ce point-là), mais son "trait" a quelque chose d'extrêmement déplaisant à l'oeil (subjectivité). Le texte est quant à lui écrit tantôt sur ce qui semble être du masking tape, tantôt comme dans un cahier. Les planches sont des composés de papiers, de dessins, de découpures de journaux, etc. Tout est fait pour nous rappeler l'éclatement. J'aime pas l'allure de la chose, mais ça reste une démarche pas banale (?) et pensée qui a le mérite d'être cohérente. Point positif, donc. (Ça me rappelle aussi les peintures de Betty Goodwin, mais ça, je suis pas sûr que ce soit une bonne chose.) Sinon, on suit un peintre qui a perdu son cœur et qui en trouve un autre abandonné sur un banc de parc. C'est l'éternelle angoisse du monde désincarné, d'une humanité sans coeur, sans rêve, sans égard pour l'autre. S'ensuit une quête existentielle plutôt commune où il finit par être question d'amour et de réveil parce qu'"au fond, les choses ne sont peut-être pas si compliquées." En lisant cette phrase-là, on a furieusement l'impression d'avoir perdu son temps. Le texte est simple, sans réelle envolée. Ça ressemble à un journal intime dans ce que ça peut avoir de spontané et de superficiel (mais sans les fautes, tout de même). On en ressort pas grandi ni transfiguré, juste un peu écœuré qu'on nous serve du pâté chinois pour un vingtième souper d'affilé : malgré les épices et le ketchup aux fruits, on a toujours affaire au "steak haché, blé d'inde, patates" que tout le monde d'ici connaît, hein, Thérèse ? (Je hais pas ça, faut pas croire, mais y'a des limites.) Au moins, Lino nous évite le pathos. Dernière phrase : "À mon avis, tout est dans la forme, même si je l'aime pas particulièrement et autre tentative de me défaire de ma subjectivité." (Et puis révision : mon commentaire sur l'allure graphique de la chose est bizarre étant donné que j'aime bien Jean-Michel Basquiat... Enfin.)
Megillah
5
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le 6 janv. 2011

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