Avec cette quatrième aventure (publication en juillet 1980), la série Jeremiah arrive à maturité. Hermann est franchement à l’aise avec ses personnages, son dessin s’est encore affirmé, son goût pour les couleurs flamboyantes éclate par planches entières (notamment les 5-10-11-15-21-35-39-41 puis la somptueuse 44) et il a élaboré un scénario complexe qui incite le lecteur à reprendre certains passages sans que cela soit une contrainte. Enfin, une touche de fantastique apporte une nouvelle dimension à la série.

On apprend que la grande catastrophe date de deux générations et que l’antagonisme entre blancs et noirs a également agité les indiens. Ceux-ci vivent dans un territoire historique totalement interdit d’accès. On ne sait pas trop comment cela se passe là-bas, mais on constate que certains cherchent à s’en évader, malgré une surveillance sous forme de patrouilles extrêmement vigilantes et bien armées.

Jeremiah et Kurdy voyagent dans un paysage désertique indescriptible où ils observent, au loin sur une crête, un étrange animal qui se déplace trop rapidement pour être identifiable. Ils ont entendu parler d’un évadé de « chez les rouges » mais aussi d’un autre qui aurait été exécuté à Lerbin’s Gate où ils se rendent.

Dans la nuit, un nommé Pinkas qui se dit magicien aide un couple au chariot accidenté. Mais Pinkas disparaît en laissant un cruel souvenir de son passage. A Lerbin’s Gate, ce Pinkas exhibe Idiamh,un singe particulièrement agile dont il fait ce qu’il veut.

La suite va entraîner une confrontation entre Jeremiah et Kurdy d’une part et une patrouille de « rouges » d’autre part. Ceux-ci guettent un groupe d’évadés parmi lesquels Jeremiah pourrait retrouver une vieille connaissance.
Hermann ne se contente pas de raconter une histoire au scénario bien ficelé. Il pimente tout cela de décors improbables, son paysage lunaire à lui, agrémenté de légers panaches de fumée aux traits caractéristiques. Il y a beaucoup d’action et des rebondissements. Le final est à couper le souffle. Hermann a le sens du mouvement et du spectacle. Il dessine ses planches comme s’il réalisait un film, de nombreux détails enrichissent aussi bien la psychologie des personnages que le monde post-apocalyptique qu’il a imaginé. Et il se montre aussi à l’aise dans les ambiances sombres que lumineuses. Le découpage des planches est un beau travail qui laisse libre cours à son inspiration. Je remarque juste qu’il a utilisé différentes couleurs pour le fond de ses bulles. Au début on a l’impression que c’est un moyen de signifier quelque chose de remarquable, alors qu’il s’agit plutôt d’une fantaisie. Quant aux dialogues, souvent percutants, ils servent à distiller les informations nécessaires à la bonne compréhension de l’album.
Electron
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le 12 mai 2013

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