La lecture des débuts de Spirou sous la houlette de son créateur fait tout d'abord ressortir une immense tendresse pour ce trait «à l'ancienne» et ces scénarios foutraques à l'humour désuet. Que le lecteur occasionnel de la série soit averti : ces premières aventures de Spirou accusent vraiment le poids des ans et sont à réserver aux passionnés du groom et/ou aux amateurs de BD anciennes.
Cet album se limite-t-il à son intérêt historique ? Oui mais pas que ! On suit avec grand plaisir les péripéties rocambolesques qui s'enchaînent sans discontinuer, on reste surpris par la créativité de l'auteur (l'héritage improbable de Bill Money, les automates égyptiens, la ville des singes parlants, la planète Zigomus...) et une fois familiarisé avec le style suranné de l'auteur, on se surprend à rire franchement devant l'humour malicieux omniprésent.
Le «ventre mou» du recueil se situe au moment de l'aventure dite du «fils du milliardaire», perturbée par la mobilisation de Rob-Vel puis son emprisonnement, et complétée tant bien que mal par son épouse Davine, le peintre Luc Lafnet et enfin Jijé. Cases décalquées, personnages mal proportionnés, intrigue sans queue ni tête... ces pages sont très difficiles à lire même si elles témoignent d'une persévérance incroyable de la part des collaborateurs du journal pour tenir le cap malgré un contexte très difficile.
En dehors de cette petite réserve, j'ai pris un immense plaisir à découvrir ces aventures de Spirou qui jusqu'ici faisaient figure de serpent de mer pour le fan trentenaire que je suis. Bravo à Dupuis pour cette formidable entreprise de réhabilitation de leur patrimoine !