Avec le succès fulgurant de la NES aux États-Unis, les héros des cartouches grises de la console s’invitent partout, sur les paquets de céréales et autres alimentaires, en jouets et jeux de société, mais aussi en séries animées, en bandes dessinées et même en film.
Bien sur, il faut avoir la trempe de Mario pour pouvoir être ainsi partout, dans une véritable mariomania un peu frénétique. Parmi les productions qui ont traversé les océans pour contenter les jeunes têtes bleu-blanc-rouge de l’époque, difficile de ne pas être de nos jours un peu embarrassé devant la fantaisiste série animée de 1989 ou les étranges idées du film de 1993.
Deux bandes dessinées nous sont parvenues, ayant eu les honneurs de sorties en librairies, publiées par la prestigieuse maison d’édition Comics USA, qui a fait découvrir tant de bons titres. Ces deux publications aux honneurs de Mario devaient probablement faire rentrer un peu d’argent, mais le tome 1 de chacun de ces deux albums ne connaître pas de suite. Le premier volet de Nintendo, La BD de Game Boy constitue une histoire complète, très surprenante dans le ton.
Dès lors, avec tous ces antécédents, on ne pouvait que s’inquiéter devant ce premier tome de Super Mario Bros, publié chez nous en 1992. Il est impossible d’y crier au génie, le résultat est au plus moyen, ce qui n’est déjà pas si mal. Il s’agit d’un recueil de petites histoires courtes, assez souvent humoristiques, qui reprend les personnages de Super Mario Bros 1 et 2 et quelques autres crées pour l’occasion.
Quelques libertés sont faites, Peach n’est pas loin de la pimbêche, Mario est parfois vaniteux, mais il faut reconnaître que les jeux vidéo n’étoffaient guère ces personnages, ces traits de caractère correspondent à ceux du dessin animé. Certaines histoires reprennent quelques idées des jeux, à l’image de « Encore vous ? » et de son histoire sans fin, ou plutôt de son game over sans fin, expliqué par un rêve (c’est bien pratique). D’autres partent dans des directions plus éloignées.
Le public visé est celui de l’enfance, tout est assez simple, volontairement exagéré, assez naïf. Les histoires ont du mal à se conclure avec une chute satisfaisante, mais quelques gags sauvent l’ensemble, parfois visuels, parfois dans les discussions des protagonistes. La bande dessinée peut se montrer drôle quand elle utilise l’absurde (« Mirage, mirage ») ou un certain second degré (« Encore vous ? », encore). Mais certains traits d’humour semblent avoir disparu à la traduction de Teshi Bharucha.
En tout cas, ce ne sont pas avec ses dessins que l’album se distinguera, très quelconques. C’est un peu trop maladroit, les traits des personnages ne respectent parfois les mêmes proportions d’une case à l’autre. Nintendo ne laisserait probablement plus passer de telles illustrations, mais le contexte est différent, la compagnie voulait distribuer sa licence partout pour s’imposer partout. Sur ce sujet., il ne faut pas hésiter à lire L'Histoire de Mario vol.1 1981-1991: L'ascension d'une icône entre mythes et réalités de William Audureau.
Ce n’est donc pas la catastrophe un peu trop rapidement pressentie, mais la lecture n’offre pas suffisamment de bons moments pour en ressortir satisfait, et ce encore plus quand on n’est plus un enfant des années 1990. L’album peut se conserver pour son statut de curiosité, peut-être comme objet de collection un jour lointain (certains tentent de pousser les prix sur internet, alors qu’on le trouve assez facilement dans les bouquineries et autres espaces de vente d'occasions), mais difficilement pour ses qualités.