Les charmants héros de Nintendo ont déjà eu les honneurs de bandes dessinées humoristiques. Comics USA avait fait connaître en 1992 quelques productions américaines. Depuis 2014 Soleil Manga publie Super Mario: Manga Adventures, déclinaison japonaise publiée depuis 1991 (!) au Japon. Mais ici la BD n’a rien d’officiel, et cela change tout, le ton est parodique, parfois décapant.
Tout ce petit monde, principalement importé des aventures de Super Mario, The Legend of Zelda ou Pokemon est facilement reconnaissable, même si les noms sont changés et que le portrait est moins flatteur que celui de sauveur de princesses empotées ou de royaumes démunis. Mario est rebaptisé Mariole, il est un peu simplet, toujours à prendre les mots au pied de la lettre, la Princesse Peach est devenue Pêche, plus irritable, moins fidèle aussi, le Link de l’album est un aventurier naif à qui il arrive les pires malchances, etc. Ce n’est pas leur intelligence qui les étouffe, la moyenne générale étant d’un bon niveau sur la bétatitude.
Ils sont malgré tout bien mis en valeur par le trait de Nikoneda, qui les recrache avec une exagération cartoon bien appréciable, avec juste ce qu’il faut de caricature. Les pages sont colorées, à l’image des productions Nintendo, on pourrait s’y croire.
C’est un humour bon enfant qui est utilisé, mais qui atteint aussi quelques pointes plus adolescentes, plus grasses, avec quelques sous-entendus sexuels et un peu de sang, mais rien de grave. Les meilleurs gags sont d’ailleurs ceux qui poussent l’absurde d’une situation vidéoludique à son extrême, comme Link qui meurt de vieillesse en essayant d’ôter une épée de son socle (il s’agit en fait d’une église enterrée) ou qui se fait ajouter un coeur de vie supplémentaire, chirurgicalement.
La BD est vraiment une œuvre française pour un public français, difficile d’envisager une quelconque adaptation avec une telle quantité de jeux de mots francophiles. Tout un running-gag repose d’ailleurs sur la mauvaise interprétation de Mariole sur son kart, qui s’invite dans une partie de cartes ou qui croit faire une course dans un super-marché. Un autre trait d’humour bien de chez nous ose associer Pikachu à Claude François, pour un résultat électrique. Ces jeux de mots ou associations sont enfantins, parfois mignons, et parfois un peu concon, sans grandes recherches.
Même si cela n’est pas obligatoire, il est recommandé d’avoir un minimum de culture vidéoludique, pourquoi pas d’avoir joué à quelques jeux Nintendo. Certains gags risquent sinon de passer à côté quand ils s’appuient sur certaines mécaniques, comme la carapace bleue de Mario Kart ou le goût de Sonic (coucou l’incruste) pour les anneaux. Pas d’inquiétudes, ce ne sont que quelques exceptions, le plus souvent même sans la référence le gag se comprend. Mais pour le geek, le fan de Nintendo, ces clins d’oeil s’apprécient d’autant plus, autorisant probablement une certaine tolérance dans leur appréciation.
Quelqu’un comme moi, qui a passé tant de bons moments sur Super Nintendo, Nintendo 64 et GameCube.
Bien conscient de la légéreté de l’ensemble, qui ne vise qu’à faire gondoler le lecteur, le plus souvent avec des gags simples, j’ai tout de même apprécié la lecture, et ce regard un peu décalé sur ces nouvelles idoles. Elles ne sont pas à leur avantage, mais on sent malgré tout le travail de passionnés, derrière la farce se cache l’hommage, et en plus c’est assez bien dessiné.
Ne parlons peut-être pas de cette bande dessinée ou de Bakamon à Nintendo, très attachée au respect de ses licences, cela lui ferait du chagrin.