Pour les adeptes de fin inéluctable...
« 9/11 » est une série née il y a quatre ans. Elle est le fruit de la collaboration des scénaristes Eric Corbeyran et Jean-Claude Bartoll et du dessinateur Jef. C’est le nom du premier cité qui a attiré mon regard vers le premier tome de cette nouvelle saga. En effet, il a su conquérir mon cœur de lecteur avec « Le chant des stryges » ou « Uchroni(e)s » par exemple. Certes, il lui est parfois reproché d’être trop productif mais je reste toujours curieux de découvrir ses nouveaux projets. « 9/11 » était donc l’un d’entre eux. Depuis, les différents épisodes sont parus et le dernier en date qui clôt l’histoire date du mois de décembre dernier. Il s’agit du sixième et s’intitule « W.T.C. / Acte 2 ».
La quatrième de couverture nous présente le synopsis suivant : « Dans la nébuleuse des réseaux politiques et financiers, les rencontres les plus improbables et inattendues ont lieu. Entre fous de Dieu et banquiers respectables, entre grands pétroliers et argentiers du terrorisme, se joue un jeu périlleux et, quand la récréation est finie, le pire cauchemar devient possible ! « 9/11 » est un thriller géopolitique qui nous entraîne dans les arcanes du terrorisme, des services secrets, des multinationales et de la finance internationale. C’est une partie de billard à plusieurs bandes où manipulations, cupidité, idéologies religieuses et politiques nous conduisent irréversiblement au 11 septembre 2001… »
Le thème de la série est indiqué dans son titre. La trame se construit autour des attentats du onze septembre. Cet événement occupait les premières pages du premier tome. Néanmoins les six tomes sont une plongée dans le passé et nous rapprochent inexorablement vers le cruel moment qui a vu deux avions s’écraser sur les Twin Towers. J’étais curieux de découvrir le traitement que pouvait offrir cette saga sur cet acte historique de notre époque. Je tiens à préciser que je ne suis ni historien, ni journaliste politique, ni économiste. Je n’ai pas donc de regard expert sur les faits qui nous sont contés. Les grands moments charnières de la trame sont réels. Par contre, je ne saurais pas dissocier la vérité de la fiction dans la grande quantité d’informations qui nous sont distillées tout au long de la narration.
Au risque d’enfoncer une porte ouverte, je me dois de préciser qu’il est indispensable d’avoir lu les cinq premiers épisodes. Les prérequis sont indispensables à une bonne compréhension de tous les enjeux. A chaque nouvelle parution, je m’imposais de tout lire depuis le début afin de maîtriser parfaitement les enjeux nombreux et variés qui alimentent la trame. En effet, les protagonistes sont nombreux et leurs interactions complexes. Le concept scénaristique fait que les auteurs doivent nous abreuver d’un grand nombre d’informations pour faire en sorte que l’intrigue soit bien ficelée. Le risque de ce type de structure est d’accumuler trop de place aux textes magistraux. Les scénaristes s’en sortent plutôt bien. Evidemment, ils ne peuvent pas échapper à certaines digressions importantes ou certaines explications un petit peu longues. Malgré tout, les défauts de ce style sont rares et sont aisément contrebalancés par l’apport de clarté à l’ensemble généré par tous ces éclaircissements.
Le bémol que j’avais trouvé dans les opus précédents concernait les dessins. Il aura accompagné ma lecture jusqu’à la dernière page de la saga. Mes sentiments à l’égard sont curieux. Le travail de la part de Jef pour se montrer précis tant dans la reproduction des traits des personnages que dans les décors est évident. Bon nombre de célébrités politiques sont aisément reconnaissables et rendent crédibles la trame en l’immergeant pleinement dans notre réalité. Néanmoins, cela n’empêche pas l’ensemble d’apparaître fragile et froid. Je n’arrive pas à être charmé par le style du dessinateur qui a tendance à m’éloigner de l’histoire plutôt qu’à m’y plonger. Je trouve cela vraiment dommage mais il s’agit d’une des faiblesses irrémédiables de l’ensemble à mes yeux. La densité narrative nécessite un support graphique qui la sublime. Ce n’est pas le cas ici, bien au contraire.
Ce dernier épisode est celui qui m’a le moins passionné. Je l’ai trouvé moins intense malgré les événements qu’il mettait en jeu. La trame est davantage diluée. J’ai parfois eu le sentiment que les auteurs avaient du mal à conclure leur aventure. C’est dommage car la construction de l’histoire était jusqu’alors la principale qualité de la saga. Malgré tout, « 9/11 » est une série qui intéressera les lecteurs curieux d’en connaître davantage sur ce moment noir de l’Histoire du monde. Par contre, elle n’est jamais arrivée à transcender sa dimension documentaire et à s’offrir une dramaturgie humaine plus forte. C’est peut-être dû à des personnages manquant de personnalité dans graphique que dans l’écriture. On ne peut pas toujours tout avoir…