Dans l’univers de la bande dessinée, si je ne devais en retenir qu’une, ce serait celle-là. Le premier tome de Sillage me marqua beaucoup. Morvan et Buchet avaient initialement prévu deux tomes, au cas où le premier n’aurait pas de succès. Heureusement, cela fait 20 ans qu’on découvre chaque année un peu plus cette série, en attendant de connaître l’ultime chapitre final.
A l’époque, je l’ai découverte grâce aux pages du magazine Maniak. Le tome 7 était déjà paru. Il m’a fallu presque 10 ans pour finalement me décider à débuter Sillage. Bien m’en a pris, je ne sais pas si j’aurais eu la maturité suffisante pour comprendre tous les enjeux auxquels est confrontée l’héroïne. Aujourd’hui, je regrette qu’il ne sorte qu’un album par an.
Commençons par le commencement : la couverture d’A feu et à cendres est simplement magnifique. Il en existe en fait deux versions. L’originale, sortie en 1998, qui a su attirer l’œil de fidèles lecteurs. L’autre, plus récente, permet de profiter un peu mieux de la beauté des personnages.
On ouvre ensuite la bande dessinée pour découvrir la première page et le dessin de Philippe Buchet, très vivant et précis, qui débute sur un paysage magnifique de forêt vierge. Et on fait la rencontre de Nävis.
Nävis. Ce personnage a sûrement réussi à charmer des générations de lecteurs. Le génie des auteurs a été de finalement créer cette héroïne en lieu et place du héros masculin auquel ils avaient initialement pensé.
Sillage est un convoi multiracial de vaisseaux spatiaux à la recherche de planètes à coloniser. Un jour, ils débarquent sur une planète inconnue. La surprise est de taille : ils découvrent Nävis, une jeune femme qui vit à l’état sauvage, en harmonie avec la nature, en compagnie de Houyo, son Tigrours. Sa particularité est de disposer de bandes blanches sur certaines parties du corps. Mais ce qui intrigue le plus Sillage, c’est que l’espèce humaine était jusque-là inconnue sur le convoi …
Dans ce premier tome, "le méchant", si on peut le nommer ainsi, a été pensé de manière très intelligente. C'est d'ailleurs ce qui fait la force de Sillage : ce n'est jamais tout blanc ou tout noir. Chaque cause est délicate et défendable. Le premier ennemi de Nävis cherche simplement à éviter la disparition de son espèce. On découvre également Snivel, robot attachant, et Bobo, un migreur (comprenez travailleur esclave qui ne pense pas) qui accède au libre arbitre.
Concernant les dessins de Buchet, je n’ai absolument rien à dire, ils sont excellents. Donc à priori, tous les albums devraient avoir au moins un 6. Le scénario du premier tome est très intéressant. On y aborde la colonisation, la destruction de l’environnement. On retrouve un peu le mythe du bon sauvage. Nävis est innocente et se retrouvera petit à petit à faire des erreurs en raison de la société corrompue qu’elle découvrira au fur et à mesure de la série. Et puis on se pose les bonnes questions, celles qui constituent le scénario principal de la série : Qui est Nävis ? Pourquoi a-t-elle des bandes blanches ? Où sont passés les êtres humains ? Nävis est-elle la dernière représentante de l'espèce humaine ?
Ce qui fait la force d’A feu et à cendres, c’est sa singularité. Elle peut être considérée comme une bande dessinée unique, qui s’arrêterait à la dernière case de la dernière page, moment à la fois magnifique, très fort mais également très violent.
Avec ce premier tome, la série Sillage posa les bases d’un succès : dessins sublimes, héroïne attachante, intrigue très prenante, univers de science-fiction digne des plus grands space opera et débats sur les enjeux de société actuels. Le Sillage Show (peut-être devrais-je dire le Nävis Show) débuta. Pour notre plus grand plaisir.