Guerre des Gaules, episode XXXV : Un nouvel espoir
Si vous avez reçu un coup de menhir inattendu qui vous a laissé pantois entre la première et la cinquième page voici un bref rrésumé : Le corps congelé d’un jeune homme habillé d’un kilt est pêché près des côtes armoricaines, non loin d’un village gaulois résistant encore et toujours à l’envahisseur, plus de quarante ans après que ses habitants aient donné leurs premières baffes à l’envahisseur romain.
L’énorme promotion et le départ de Uderzo – l’un des deux co-fondateurs de Asterix – faisaient de « Asterix chez les pictes » l’album de bande dessinée le plus guetté de cette automne. Le contexte était rendu encore plus tendu pour les deux nouveaux auteurs continuateurs de la série de par l’énorme déception occasionnée par le précédent album – « l’anniversaire d’Obelix ». A ce contexte on peut ajouter que la série avait depuis longtemps déjà perdu ses fans historiques en raison du virage pris par René Uderzo, qui seul en charge de la poursuite de la saga depuis 1978, avait décidé de rajeunir celle-ci depuis 15 ans en s’adressant à un nouveau lectorat plus imbibé de mangas et de comics que des classiques franco-belges. A cela s’ajoutait la baisse continue de la qualité des histoires depuis la disparition il y a 35 ans du célèbre scénariste René Goscinny.
Alors que penser de ce dernier Asterix ? Premièrement qu’on retrouve du plaisir à le lire ce qui n’était plus arrivé pour beaucoup depuis au moins « Asterix chez Rahazade » en restant très indulgent voire depuis « Asterix chez les Belges » pour les zélateur de René Goscinny. Et il n’est déjà pas si mal de retrouver un peu de joie en feuilletant cet album, au regard de ces dizaines d’années de disette tout en ayant un peu conscience de l’énorme pression qu’ont due gérer Ferri et Conrad, en raison des enjeux commerciaux, du renouvellement complet des auteurs – attendus au tournant de chaque page – et des délais de publication.
Le dessin est très largement inspiré de l’âge d’or d’Asterix qu’on peut situer entre « la Serpe d’Or » et « Asterix chez les belges », mais qui pour ses rondeurs, sa jovialité, se situe entre « Asterix chez les Goths » et « le Bouclier Arverne », Uderzo modifiant son style après 1968 lors de « Asterix aux jeux Olympiques ». Conrad, connu pour ses « Innommables » a réussi a recréer cet univers fait de courbes et de gros nez. C’est un réel plaisir de retrouver Obelix tout en rondeur même si le dessin est légèrement plus anguleux que celui d’Uderzo dans les années 60. On peut ajouter que Conrad dessine d’avantage dans la perspective que sur un même plan comme l’aurait fait Albert Uderzo, ce qui assure une transition avec la modernité précédente des récents albums. On pourra regretter néanmoins que la traditionnelle pleine page de scène d’ensemble, habituellement truffée de détails, ait été un peu simplifiée, sans doute par manque de temps.
Demeure également l’impression que les auteurs on tenté de se débarrasser vite du cahier des charges, tout en le respectant. C’est particulièrement visible par exemple dans la traditionnelle bagarre entre Oldralfabétix et Cétautomatix, la réplique obligatoire du « qui est gros ? » habituellement lancée quasiment à tous les albums par Obelix, les rapports entre Agecanonix et sa jeune compagne et tant d’autres passages obligés. Ces jalons à assurer sont évacués par de rapides jeux de mots tombant parfois comme un cheveu dans la potion magique. De même les cases sont souvent trop fournies et il y a presque un jeu de mot par vignette, voire d’avantage, ce qui vient polluer une histoire déjà assez ténue. Sans doute est ce du à cette nouvelle génération d’auteurs très doués dans le strip, le gag d’une page ou le dessin de presse (on pense à Jul par exemple) mais qui peine beaucoup plus à raconter une histoire complète tenant dans le traditionnel 48 pages. Peut être est ce aussi le travers d’un premier album où les auteurs ont voulu en mettre beaucoup en gage de bonne volonté et de savoir faire : problème de dosage à regler lors des albums suivants.
L’ensemble demeure néanmoins agréable et le pari de renouer avec les anciens lecteurs est réussi. Aucun doute : le suivant n’en sera que meilleur par Toutatis !