Astro Boy par Ninesisters
Il s'agit d'un des titres phares de l'auteur, écrit dans les années 50 et destiné à un jeune public. Autant dire que je ne m'attendais pas à la maturité d'un Histoire des 3 Adolf, et en effet nous retrouvons ici un héros naïf et un manga qui se situe clairement dans la lignée des shônen. Par rapport aux représentants récents du genre, cela se ressent particulièrement dans le célèbre arc « Le Robot le plus fort du Monde » (celui qui a servi de base au Pluto de Naoki Urasawa), qui allie personnages charismatiques et action ; sachant que cet arc reste sans doute le plus populaire de l'œuvre, je me dis que les règles du succès n'ont pas tellement changé en 50 ans. Ce qui est intéressant dans cette histoire, c'est qu'elle n'est pas particulièrement représentative de ce manga, ou du moins des chapitres proposés dans cette anthologie. Si nous avons affaire à du Osamu Tezuka des jeunes années, nous retrouvons bien ses thèmes de prédilection, même s'ils se trouvent plus dilués que dans ses publications moins anciennes : dans la forme, Astro Boy est avant tout un shônen à forte connotation SF.
Même si je savais que je ne lirais pas une de ses œuvres les plus fortes – celles-ci commençant à apparaître vers la fin des années 60 – j'ai beaucoup apprécié cette anthologie, et c'est aussi ce qui la rend frustrante. Les arcs ont été choisis selon leur qualité (et sans doute selon leur longueur respective), mais rien ne dit que cette série ne contient pas d'autres histoires de grande qualité ; paradoxalement, rien ne prouve que nous n'avons pas ici les seuls passages dignes d'intérêt dans Astro Boy. Pouvez-vous imaginer qu'il manque même les premiers chapitres de ce manga, ceux évoquant la naissance d'Astro et ses relations avec le professeur Tenma ? Ce-dernier apparait à plusieurs reprises dans l'anthologie, et nous sentons bien que ses rapports avec sa création évoluent énormément, malheureusement dans des histoires elles-aussi manquantes.
Il n'y a pas de début hormis un court résumé, pas de fin – j'ignore s'il y en a une dans le manga complet – c'est forcément frustrant.
Le plus terrible dans tout ceci, c'est que mes griefs envers cette série concernent plus l'édition que le titre lui-même. D'un côté, je me dis que si c'était pour nous sortir seulement 5 volumes quoi qu'il arrive, cela ne valait pas le coup de publier Astro Boy (sauf s'il s'agit d'une obligation contractuelle pour pouvoir enchainer avec Pluto) ; et maintenant que nous avons cette anthologie, il devient encore plus improbable qu'un éditeur sorte l'intégralité. D'un autre côté, si Kana n'avait pas fait cette anthologie, je n'aurais peut-être jamais lu ce manga (même si je ne considère pas vraiment l'avoir lu puisqu'il en manque le plus gros morceau). Encore d'un autre côté, ces chapitres – qui ne pouvaient se permettre de ne pas être bons vu qu'ils sont censés constituer le haut du panier – sont peut-être les seuls valables dans toute la série, mais je n'ai strictement aucun moyen de le savoir. Encore encore d'un autre côté, c'est fou tout ce que nous pouvons faire avec des conditionnels, mais cela traduit bien mon état d'esprit : j'ai apprécié ce manga tout en sachant qu'il y avait peu de chance que je l'aime autant que Demain les Oiseaux, j'ai retrouvé nombre des aspects qui font que je lis du Osamu Tezuka, je considère que ce titre mérite le détour, mais je n'apprécie pas d'avoir dû me cantonner à cette anthologie, surtout compte-tenu des qualités des chapitres proposés.
Je laisserai le soin aux autres personnes intéressées par ce titre de choisir, en leur âme et conscience, si elles acceptent un tel procédé (que je ne voudrais pas voir se généraliser à toutes les séries un peu vieilles qui pourraient être publiées en France) ou si elles rejettent en bloc cette anthologie.