Il faut un peu de courage et de bienveillance pour le lire, mais son instruction peut être salutaire

(Pour la forme : cet ouvrage a autant sa place dans un rayon bandes dessinées qu'un roman illustré.)


J'ai un peu de mal à cerner la collaboration entre les deux signataires du bouquin dans ce que l'une et l'autre y ont apporté. Je connais mieux Ovidie pour certains de ses documentaires sur Arte, son implication pour l'éducation sexuelle des jeunes et surtout pour son bouquin "À un clic du pire" que j'avais trouvé très instructif et même recommandé autour de moi.


Je découvre donc ce bouquin, petit essai illustré et perdu au rayon BD, et j'y lis un chapitre au hasard. Ce fut la lettre à celui qui se dit friendzoned.


J'ai eu peur, je dois l'admettre car je n'y ai pas reconnu la bienveillance et l'intelligence qui m'avaient marqués dans le bouquin déjà cité. J'ai eu peur de tenir entre les mains un brûlot féministe qui distille toute sa rancœur misandre. Cette lettre me semblait tant décrier la position masculine dans cette plainte de "friendzone" pour en montrer les aspects négatifs pour la gente féminine et ce, donc, au détriment de ce que cette plainte peut montrer aussi d'une souffrance masculine dans nos sociétés que j'en ai eu du mal à imaginer des possibilités de bienveillance sur les autres chapitres.
Sans donc lire ni me confronter au reste de l'ouvrage cette peur s'est un peu mue en certitude, en colère aussi mais également en incompréhension quant à ce titre qui laissait transparaître un essai pour renouer un dialogue là où j'avais fini de me faire l'idée d'un bouquin assassin envers la gente masculine.


Bref, n'aimant pas me faire des idées sans m'y confronter, j'ai décidé d'acheter ce bouquin que je m'apprêtais donc à détester (démarche à demie honnête, donc, je le conçois).


Après lecture je suis bien obligé de reconnaître mon erreur. On est loin du tract anti-homme.
Et si la narration se veut faussement épistolaire en imaginant une femme écrire à ses différents amants qu'elle n'identifie qu'au travers de leurs méfaits, elle n'en distille pas moins quelques leçons salutaires aux deux sexes.
Je sors apaisé de ma lecture, réconcilié avec Ovidie.


Pour autant, et malgré un ou deux derniers chapitres qui tentent un peu maladroitement de donner le change, je regrette un certain point de vue forcément très femino-centrée de ce travail. L'homme, s'il n'est pas autant décrié et attaqué que ce que j'en avais imaginé, est quand même souvent mis en avant comme le mauvais élément du couple. C'est lui qui cherche à flatter son ego, lui qui cherche à à reproduire toutes les mauvaises pratiques vues dans les pornos (bien qu'on n'oublie pas de mentionner que les femmes en sont de bonnes consommatrices également) et j'en passe. S'il n'est donc pas aussi misandre que je l'avais imaginé à la lecture d'un seul chapitre et s'il est plus bienveillant que ce que je pensais de prime abord, l'essai aurait quand même pu bénéficier d'un point de vue masculin à faire dialoguer avec celui de ses autrices. Cela aurait sûrement permis de casser un peu le mythe de l'homme plein de jouissance et sans souffrance, par là de montrer davantage les travers de notre société dans ses injonctions au sexe pour les deux parties et enfin, pour conclure, de renouer ce fameux dialogue entre femmes et hommes.

Jonathan_TJo
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le 6 déc. 2020

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