c'est une poupée à qui l'on dit non, non, non, non....

Les producteurs de Conjuring ne s'y étaient pas trompés à la sortie en salle de leur film et après son succès : l'une des véritables stars du film, l'un des atouts majeurs n'était autre qu'une immonde poupée par laquelle on nous avait servi une introduction réellement poignante et maîtrisée. L'annonce d'un film portant sur elle ne s'est ainsi pas faite attendre.
Oui, sauf que si au passage ils avaient pris un minimum la peine d'analyser la fameuse introduction citée plus haut pour en comprendre les mécanismes qui ont permis de créer de l'angoisse à partir de la simple Annabelle, ils auraient peut-être évité de nous sortir une daube sans originalité et sans fond.


Le premier grand faux pas du film pour moi sera donc de n'avoir su garder l'esprit de son grand frère "Conjuring" et ce sur plusieurs points :
- Conjuring nous servait une histoire estampillée "à partir de faits réels" pour laquelle on peut même facilement trouver des témoignages dont celui de l'épouse Warren. A chacun de voir ensuite s'il y croit ou non, mais ça donnait du corps au récit (d'autant plus avec le coté scientifique/démonologique qu'apportaient les époux Warren). Annabelle nous sert quant à elle une histoire inventée de toutes pièces pour créer des origines à la poupée et sans se soucier pleinement de pouvoir paraître à minima réaliste.
- James Wan avait su jouer des codes des films du genre pour surprendre même les habitués. Rien qu'avec la BA de son film il y avait un jeu car elle semblait nous spoiler tous les moments forts alors qu'il n'en était rien, nous faisant donc baisser la garde pour les moments opportuns. J.R.Leonetti va lui s'embourber dans les codes du genre au point de devenir prévisible et même parfois grotesque.
-L'introduction du premier ne nous montrait que la poupée et avait su en créer une atmosphère réellement angoissante. Celui-ci se contente de placer la poupée au centre et de montrer d'avantage sur les cotés avec mille artifices déjà surexploitées ailleurs.


Je vais arrêter ici le court parallèle entre les deux films pour me consacrer d'avantage sur celui qui nous intéresse là. Simplement au vue de la démarche qui vient sous-tendre ce film-ci - complètement liée au précédent - et au vue de la réussite que fut à mes yeux le premier, il me semblait opportun de faire cet aparté en premier lieu.


Annabelle, donc, a pour principale défaut de ne pas vraiment surprendre, exception faîte de quelques jumps-scare bien placés. Les clichés scénaristiques sont légion autant que les clichés sur les effets d'angoisse et de peur, si bien que le tout est finalement savamment saboté et que la recette ne prend pas.
On sent parfois que le réalisateur ou les scénaristes sont gênés par la poupée et ne savent concrètement pas quoi en faire, ils ne savent surtout pas comment l'utiliser. Ils en arrivent tout bonnement à la mettre de coté et à donner la part belle à d'autres a**pparitions et démons**. Ils le font tant et si bien que le lien fait par les personnages entre ce qui leur arrive et la fameuse Annabelle semble presque tomber de nulle part. La poupée est mise de coté pour des pans entiers du film, il y a des apparitions ténébreuses, un démon à corne : c'est la faute de la poupée, pardi ! Même nous autres spectateurs, ayant le fin mot de l'histoire, avons de quoi nous poser la question.


Elle était sensée être la star du film, l'objet d'angoisse et il va sans dire que le résultat en est bien loin.
Les apparitions qui lui sont préférées sont par ailleurs trop vite montrées, ne laissant aucun suspens sur ce qu'ils sont, comment ils sont. Le réalisateur s'ampute ainsi un membre en montrant clairement son démon à cornes, si bien même qu'on y voit très vite un simple acteur avec du maquillage.


Que la poupée n'existe pas que pour elle même et qu'une entité "inhumaine" s'en serve était quelque chose d'entendu déjà avec Conjuring. Mais ce qui en a fait la force dans l'intro du film de Wan était justement ce coté insidieux qui avait laissé croire aux personnages que la poupée était possédée par l'esprit d'une petite fille, les amenant à l'adopter et à négocier avec elle. Toute l'action autour de la poupée n'avait finalement eu lieu qu'avec elle, non avec des apparitions démoniaques tout autour. Ce n'eut pas forcément était une mauvaise idée, mais telle quelle le procédé est beaucoup trop brute, beaucoup trop grossier.


Si l'on demande à un enfant ce qui peut faire peur, il répondra souvent un monstre. La réalisation d'Annabelle n'aura pas cherché plus loin non plus et n'aura pas même pris la peine de le faire de façon intelligente.


J'étais surpris également durant la séance d'avoir des séquences où l'image semblait beaucoup moins net, moins bien cadrée. Des moments brefs et furtifs mais qui donnaient l'impression d'avoir étés filmés avec une caméra de moins bonne qualité et dans un amateurisme des plus complets. Un passage dans un ascenseur sera même filmé en plongée à partir d'un coin supérieur de la cabine, comme s'il était filmé à partir d'une caméra de surveillance, mais sans que rien n'en soit fait. Ce genre de moment un peu "amateur" en mon sens sont assez nombreux.
Je prends pour dernier exemple une séquence où il nous est montré une vaste plaine au loin pour nous montrer le temps qui passe à travers le coucher de soleil accéléré. Sauf que le film se déroule en pleine ville et que la transition du temps qui passe n'apportait absolument rien.


Je ne 'arrêterai pas sur les clichés scénaristiques, qui sont autant légion que les clichés mécaniques pour créer de l'angoisse. Simplement je regrette que l'intrigue du film soit parti sur cette famille sortie de nulle part plutôt que de ne s'être intéressée d'avantage à cette étudiante infirmière que les époux Warren avaient rencontrée pour la poupée. Ça manquait peut-être de spectaculaire pour eux ou ils avaient peur de tomber déjà dans la redite.


Le résultat ici est en tout cas bien loin des promesses et sent à plein nez le produit mercantile irréfléchi et fait dans la hâte pour profiter du succès d'un premier film et de la popularité inattendue d'un simple objet, devenu à lui seul synonyme d'angoisse à l'écran.
Ils avaient du pain béni entre les doigts, ils l'ont donné aux cochons. On n'en gardera qu'un intro qui nous met un peu de tension et le feux d'artifice final qui accélère le rythme et regagne de l’intérêt, ce qui laisse une bonne heure d'ennui entre les deux.

Jonathan_TJo
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le 9 oct. 2014

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Jonathan TJo

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