Quand Blueberry chasse un trésor et que la poussière du Far West se teinte de rouge

Avec Ballade pour un cercueil (1974), Jean-Michel Charlier et Jean Giraud (Moebius) livrent un western crépusculaire où la frontière entre héros et anti-héros se brouille dans le sable du désert. Ce quinzième tome de Blueberry est une véritable symphonie dramatique où le titre annonce la couleur : ici, on marche avec la mort, et chaque pas résonne comme un coup de tambour funèbre.


L’histoire reprend là où Chihuahua Pearl s’était arrêté. Mike Blueberry, poursuivi par des ennemis à chaque coin de cactus, est embarqué dans une chasse au trésor pleine de promesses et de trahisons. L’objet de toutes les convoitises ? Un butin perdu dans le chaos de la guerre civile. Mais comme toujours avec Blueberry, ce n’est pas juste une histoire de lingots et de revolvers : c’est une plongée dans les tréfonds de l’âme humaine, là où l’avidité, la vengeance et le désespoir se mêlent dans un cocktail explosif.


Blueberry, égal à lui-même, incarne le cow-boy désabusé par excellence. C’est un homme de principes, mais ces principes sont constamment mis à l’épreuve dans un monde où tout le monde triche. Dans cet album, il est plus vulnérable que jamais, traqué de toutes parts, mais il garde ce mélange unique de ruse, de courage, et de fatalisme qui le rend si fascinant. On le suit avec une tension permanente, car chaque décision semble précipitée par le destin vers une fin qui, on le sent, ne sera pas rose.


Visuellement, Jean Giraud est à son apogée. Les paysages arides, les scènes d’action haletantes et les visages marqués par la vie (et la mort) explosent de réalisme et d’émotion. Chaque case est une œuvre d’art qui capture l’essence du western tout en y ajoutant une dimension presque mythologique. Le désert devient un personnage à part entière, un témoin muet des bassesses et des grandeurs humaines. Les détails, des ombres portées aux expressions des personnages, font de cet album une expérience visuelle inoubliable.


Le scénario de Jean-Michel Charlier est une leçon de maîtrise. L’intrigue est dense, les rebondissements nombreux, mais tout reste cohérent et captivant. Les dialogues sont ciselés, oscillant entre tension dramatique et un humour noir qui allège parfois l’atmosphère. Ce qui frappe le plus, c’est l’ambiguïté morale qui traverse l’histoire : aucun personnage n’est tout blanc ou tout noir, et les motivations de chacun ajoutent des couches de complexité à cette tragédie de l’Ouest.


Le rythme de l’album est parfait : une alternance habile entre les scènes d’action spectaculaires et les moments plus introspectifs qui permettent de souffler… mais jamais trop. Chaque page pousse le lecteur un peu plus loin dans cette course au trésor mortifère, jusqu’à une conclusion aussi sombre que mémorable.


En résumé, Ballade pour un cercueil est un western de haut vol, où Charlier et Giraud montrent une maîtrise totale de leur art. L’album combine une narration intense, des personnages fascinants, et un style visuel à couper le souffle pour créer une œuvre qui transcende le genre. Une aventure qui rappelle que, dans le Far West, chaque balle tirée laisse une trace… et que Blueberry, héros tragique, est toujours prêt à suivre cette trace jusqu’à la fin. Une ballade où chaque note est un chef-d’œuvre.

CinephageAiguise
9

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il y a 11 heures

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Critique de Ballade pour un cercueil - Blueberry, tome 15 par raisin_ver

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