Ça couvait depuis un petit moment... le sketching avait envahi la BD, pour le plus grand bien de celle-ci, et en avait renouvelé les codes. Un grand vent d'air frais. Je me demandais quand il trouverait ses limites, et Berlin 2.0 en est, il me semble, une bonne illustration. C'était formidable de voir le quotidien envahir les cases, pousser les murs, déteindre sur les dialogues, donner vie à des situations banales mais symptomatiques. C'est aussi le propos de cette histoire : une française débarque à Berlin pour des raisons de française (y'en a marre de Paris, tout y est cher et codifié, on étouffe sous les conventions, tout ci tout ça...) et se frotte à la douceur de vivre à la berlinoise, jusqu'à ce qu'elle se casse les dents sur le système allemand, peu protecteur du travailleur et finalement très libéral, dans le sens glauque du néolibéralisme ambiant. Commence la complainte de la travailleuse hyper-qualifiée à qui on offre des stages à deux balles. Sur ce point-là, l'Allemagne de Merkel ne semble rien avoir à envier à l'Espagne de Rajoy. La pauvre nana nous décortique alors le piège qui se referme sur le jeune diplômé, attiré par les sirènes de la coulitude, qui n'a plus un rond pour se payer sa bière alors qu'il vient de se cogner 40 heures de travail dans une ambiance qui rappelle le Japon de Stupeur et tremblements. Tout ça pour pouvoir se trémousser sur de la techno le week-end. Ça mérite certainement d'être analysé, tout ça, les mini-jobs, la génération Erasmus, la branchitude molle du bide, mais total, je me demande si la BD était la bonne forme à adopter. Là où Portugal nous trimballait à son rythme contemplatif dans des tas de petits recoins pittoresques, au premier sens du terme, Berlin nous assomme de façon assez statique, en nous assénant des conversations (geignardes) sur le marasme économique européen autour de la même table de café sur 45 vignettes d'affilée. D'où un certain ennui, en dépit de l'intérêt de la thèse développée... Et puis le coloriage Photoshop trouve lui aussi assez rapidement ses limites.

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le 8 mai 2016

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