Black Clover : un Naruto à l’école des sorciers ?

Nouveau titre issu du Weekly Shonen Jump de Shueisha, Black Clover cherche le succès en empruntant clairement divers éléments à d'illustres prédécesseurs. Pour un résultat tout à fait correct, qui séduira un jeune lectorat qui découvre le manga, mais qui manque pour l'heure terriblement d'originalité et d'identité.


Asta est la risée de son village : aucun pouvoir magique et pourtant la plus haute des ambitions, celle de devenir l’Empereur-Mage, souverain d’un Royaume tout entier dévolu à l’usage de la magie. Yuno, élevé avec lui, partage son rêve, mais présente lui des prédispositions naturelles qui lui promettent une destinée des plus favorables. Les voici donc rivaux, engagés dans une ascension parallèle au sein de l’ordre des Chevaliers-Mages, le jeune excité que tous considèrent comme un raté, et le brun ténébreux perçu comme un génie.


Le prodige et la paria, élevés ensemble, voilà un début qui rappelle furieusement le déjà culte Naruto. Et il est vrai que les caractérisations d’Asta et de Yuno, ainsi que la manière de poser leur relation comme une des bases du récit apparaît comme une sorte de décalque, adouci pour le moment, de la relation entre Naruto et Sasuke dans le manga de Masashi Kishimoto. D’autant que le premier chapitre, qui voit le héros découvrir son pouvoir face à un voleur extérieur au village, rappelle là encore la manière dont Naruto acquiert lui aussi sa première technique ninja. Sans parler du rêve du héros, classique au possible.


C’est dans les vieilles marmites que l’on fait les meilleures soupes : c’est ce qu’a dû se dire Yuki Tabata, dont le manga a débuté alors que se terminait justement la publication de Naruto dans le Weekly Shonen Jump. Changeons le cadre en remplaçant un monde de ninja par un monde de sorciers, et le tour est joué.


Même si là, avec les compagnies de Chevaliers-Mages que les jeunes aspirants intègrent, on retombe sur un autre succès récent du shonen : Fairy Tail et ses guildes de mages ! D’ailleurs, certains personnages de la Compagnie du Taureau Noir qu’intègre Asta paraissent directement emprunté au titre de Hiro Mashima.


On le comprend donc rapidement : Black Clover marche de manière évidente dans les pas de ses plus illustres et immédiats prédécesseurs, espérant appliquer une recette jugée gagnante pour s’imposer. Cette inscription dans des standards, qu’il s’agisse de ceux du shonen nekketsu de combat 1 ou de ceux des succès antérieurs, s’effectue du coup au détriment de l’originalité du titre, pour le moment assez fade et un peu trop sage et appliqué.


Reste quand même un dessin très agréable et réussi, détaillé, précis et dynamique, offrant de beaux portraits des protagonistes et de jolies scènes d’action. Ainsi qu’une ambiance décontractée et bonne enfant tout à fait sympathique. Et si les personnages manquent encore d’épaisseur, prisonniers des archétypes dont ils sont extraits, ils s’avèrent néanmoins bien campés et convaincants dans leurs caractérisation, à commencer par Asta, le héros que nous suivons.


La question est à présent de découvrir ce que Yuki Tabata a véritablement à raconter et comment il compte déployer un univers qui lui soit propre. Si le décalque peut suffire pour assurer un lancement, il n’est pas possible de s’y cantonner au risque de demeurer un "mangaka copieur" à l’image du ninja copieur qu’était Kakashi dans Naruto. Car pour devenir le successeur d’un hit comme celui-ci, on ne peut se contenter de le plagier : il faut savoir s’en inspirer sans pour autant le singer, comme My Hero Academia semble le démontrer actuellement.


Chronique originale et illustrée sur actuabd.com
En tout cas le Jump paraît croire au potentiel du titre, le soutenant, malgré des débuts poussifs, depuis son lancement au Japon il y a dix-huit mois. Et un anime se profile à l’horizon qui devrait enfin lui permettre d’augmenter ses ventes. En France, il séduira certainement un lectorat qui découvre le manga, et moins peut-être celui déjà familier de Naruto, One Piece ou Fairy Tail. Notons qu’il bénéficie d’une traduction inspirée et vivante de Sylvain Chollet, un bon point, indéniablement.

seleniel
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le 29 août 2016

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