Bob Denard, le dernier mercenaire relate la carrière du célèbre barbouze, qui s’est illustré comme le sanglant homme de main de la « Françafrique » de Jacques Foccart. Du début des années 60 à la fin des années 90, Denard a semé le chaos dans le bouillonnement sanglant des décolonisations africaines, au gré des intérêts politico-économiques de ses maîtres.
Chien de guerre, provocateur, aventurier, patriote sans retenue, la figure de Bob Denard est restituée sobrement, avec distance par le scénariste Olivier Jouvray. Elle provoque néanmoins une certaine fascination (du Mal), un grand frisson de stupéfaction et d’horreur devant un monstre mythique.
Lilas Cognet est au diapason avec un dessin qui alterne habilement un découpage case traditionnel, pour les passages plus documentaires et des fresques débridées, grouillantes, sinueuses pour illustrer avec force la violence et la férocité que déclenche et nourrit Bob Denard. Elle semble puiser son inspiration aux mêmes sources que le Picasso pré-cubiste des Demoiselles d’Avignon et que le Gauguin final : les arts primitifs africains, espagnols et polynésiens.
La Mort personnifiée accompagne Bob Denard tout au long de l’album, goguenarde, cynique, enjouée, affamée, pour surligner la volonté des auteurs de donner à l’épopée du mercenaire la dimension du Grand Guignol originel : une vie vouée à dispenser une épouvante macabre, sûre d’elle et au-delà de toute morale.