C’est un étrange voyage à Calcutta
que l’auteur nous propose ici, qui mêle l’Histoire et la fiction pour tenter de donner à voir divers aspects de la ville indienne : entre mystique et désillusions, entre quête et absorption de soi. L’ensemble manque malheureusement de structure pour consolider
un récit dénoué au message un peu pauvre,
perdu dans les horizons évoqués mais rarement creusés qui tissent la narration. La déception se poursuit face au travail graphique, dense certes, mais peu abouti, un peu brouillon, un peu brut.
D’une longue introduction décousue qui dresse le filigrane derrière l’intrigue d’un homme qui voyage à travers le globe depuis la crucifixion du Christ, posant là l’idée d’un immortel témoin à l’histoire des hommes, jusqu’à la quête infortune d’un livre rare dans le Calcutta de nos jours, Sarnath Banerjee promène ses séquences sur différentes époques et dresse de nombreux parallèles entre un XVIIIème siècle de débauche et le XXIème naissant pour tenter de situer
son personnage principal en résultante d’une série aléatoire d’évènements et de petits chaos.
Le voyage est lointain autant qu’intime mais le manque de connexion entre les scènes dessert profondément le plaisir en raccrochant le lecteur à peine décroché sans transition, sans lien entre les séquences ni entre les époques : la charge de travail pour fabriquer ce qui manque devient alors trop importante pour que l’intérêt y survive.
Clairement, le scénario manque affreusement de liant… d’écriture.
Côté dessin, si l’ensemble n’est pas réellement désagréable, l’amateur de noir et blanc fin sera déçu : les portraits sont grossiers, les transitions inexistantes. Là où l’artiste aurait pu enrichir son ouvrage de jeux de couleurs, d’ambiances ou de styles, c’est
une certaine pauvreté linéaire qui illustre un ensemble morne et sans vision.
Pas vraiment laid mais loin d’être beau.
Sarnath Banerjee, unique ouvrage paru en France, manque le coche : l’influence européenne et occidentale dévore les rares fulgurances du bouquin, la mystique supposée tendre le suspense autant que l’intrigue reste trop inexplorée pour que cela fonctionne, et la surcharge d’informations historiques et anecdotiques nuit largement à la compréhension globale, ajoutant toujours plus de chaos et de déconcentrations secondaires là où le récit mériterait d’avoir d’abord été dénudé avant de se parer. Au final,
beaucoup de fouillis pour une escapade à Calcutta
qui ne dévoile pas grand-chose de la ville et ne donne pas même envie d’y voir plus loin.
C’est fastidieux, bien triste, et bien dommage !