Douce France
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le 19 févr. 2016
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Robert Scarpinato, procureur général de Palerme résume parfaitement un des propos du livre dans la postface de celui-ci : "Il y a deux Histoires : l'Histoire officielle, menteuse, qu'on enseigne, puis l'Histoire secrète, où sont les véritables causes des événements, une histoire honteuse."
Et pour cause, l'album s'ouvre sur un assassinat (celui du juge Renaud) et se clôture sur l'enquête d'un autre (celui du ministre Robert Boulin).
Et entre les 2, une obscure organisation , le SAC (Section d'Action Civique) qui sort tout droit des années De Gaulle et qui imposera sa "loi" en totale impunité jusqu'à l'action de trop, l'assassinat d'une famille entière.
La violence de leurs actions sera longtemps ignorée du plus grand nombre puis oubliée par les nouvelles générations ( qui a entendu parlé du SAC ? De l'assassinat du juge Renaud ? Peut être de l'affaire Boulin pour les plus consciencieux d'entre nous ) et pourtant, à cette époque, le SAC était partout, parasitant les divers organes du pouvoir sous couvert de la lutte anti-communisme et le soutien au gaullisme.
Milice sur entraînée (nombreux membres sortent de l'armée et ont combattu en Algérie ou en Corée), elle imposait sa loi par la violence, la menace et la peur.
Une sorte de terreur organisée où il fallait apprendre à se taire. De ce point de vue, les divers témoignages qui égrainent cet album sont édifiants : menace, chantage, passage à tabac et mort suspecte, tout y passe comme dans un bon film de conspiration sauf qu'ici, c'est la réalité de l'Histoire de notre pays.
Etienne Davodeau illustre une véritable enquête journalistique mené par Benoït Collombat, grand reporter à France Inter, qui connaît parfaitement le sujet.
Celui-ci est partagé en plusieurs chapitres : le premier abordant l'assassinat du juge Renaud, le casse de Strasbourg par le gang des lyonnais et le fameux SAC. Puis , ils détaillent l'influence de ce SAC, son rôle, son utilisation que ça soit dans le domaine politique ou celui de l'entreprise (le SAC servant à lutter contre certains syndicats de gauche après mai 68) et enfin l'album se termine sur la mort du ministre Robert Moulin, faux suicide ou vrai assassinat politique toujours non élucidé.
Chacune des parties est parfaitement documentée (par les explications de Collombat) et agrémentée de plusieurs témoignages hallucinants.
Ce qui permet au lecteur sans culture politique de cette époque, d'être à aucun moment perdu par les noms, les dates ou les faits.
De plus, Davodeau,en accompagnant le journaliste, devient le témoin candide de cette enquête et se fait l'intermédiaire du lecteur à travers des questions qu'on aurait pu poser si on avait été à sa place.
L'ensemble, riche et foisonnant de détails, se dévore (même si je l'ai dévoré en 3 fois), captive mais effraie voire dégoûte.
On nous parle toujours de "la petite Histoire qui fait les grandes".
Avec cette enquête , on se rend bien compte que cette petite histoire, on a de cesse de nous la cacher car elle est parsemée d'actes inavouables, d'une violence inacceptable et d'une profonde injustice.
Comme le précise les auteurs à la fin de l'album, la plupart des acteurs de cette histoire disparaissent et n'ont (et n'auront) jamais à répondre de leurs actes, qu'ils aient été de simples exécutants ou des hommes plus influents.
Cette trace, Davodeau l'a parfaitement retranscrit sur la sublime couverture de son album : une trace de sang qui entache et bafoue un idéal politique.
Une tâche inavouable mais qui fait pourtant partie de l'Histoire de notre pays.
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Créée
le 22 oct. 2015
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