Douce France

Après une seconde guerre mondiale marquée par les horreurs, une guerre d’Algérie sous le signe de la torture, la Vème République connait une naissance imprégnée par la souFrance. Nous arrivons dans les « années de plomb », (1960 à 1980).

Petite définition pour les incultes qui me lisent (j’avoue que je ne connaissais pas exactement l’expression avant de m’intéresser de plus près à cette période) L’expression « années de plomb » désigne des périodes de l’histoire contemporaine marquée par la violence politique. Avec une expression pareille on tout dit et rien dit à la fois.

Car ces années-là sont bien sombres. C’est le temps où les juges gênants sont tués. Où les braquages des banques servent à financer des campagnes électorales de certains partis politiques. Où les meurtres de ministre sont grossièrement maquillés en suicide. Où les milices patronales brisent les grèves et les genoux des grévistes. Où le Service d’Action Civique (SAC), qui est à l’origine une milice du parti gaulliste est plus comparable à la mafia italienne qu’à l’association des retraités de Châteauvieux-les-Fossés qui se réunit le Dimanche pour la pétanque hebdomadaire.

C’est sur cette violence dont est tachée la Vème République et sur ces sombres années de plombs, méconnues du plus grand nombre, qu’Étienne Davodeau (auteur de bande dessinée) et Benoît Collombat (grand reporter à France Inter) font leur enquête sur ces sombres années de plombs.

Et là vous avez compris ! Ce n’est pas une Bande Dessiné qu’on lit tranquillou aux chiottes comme un bon Astérix ou un Titeuf (qui personnellement me facilite le transit).

Après que Smile m’ai fait découvrir les séries documentaires avec l’excellent Making a Murderer, c’est comme une grande que je découvre pour la première fois une Bande Dessinée du même genre.

Davodeau qui suit pas à pas Collombat dans son enquête devient en même temps notre meilleur ami portant notre voix. Car les questionnements que l’on se fait au fil de l’investigation sont clairement posés par le dessinateur, devenant ainsi notre intermédiaire. Il arrive aussi quelques fois qu’il nous interpelle, nous explique, prennent en compte notre présence.

Avec un dessin qui donne l’impression de lire des planches que l’on trouve dans certains journaux, l’enquête nous donne tous ces détails, parfois (et même souvent) à nous dégouter de la politique et de l’idéal que l’on pourrait se faire de la Vème République, idée magistralement illustrée par la couverture : une tâche de sang sur ce Général De Gaulle qui représente à lui seul l’idée de Justice, de Droit, de Liberté que prône la Vème.

Robert Scarpinato (procureur général de Palerme) dirait :

Il y a deux Histoires : l'Histoire officielle, menteuse, qu'on
enseigne, puis l'Histoire secrète, où sont les véritables causes des
événements, une histoire honteuse.

C’est la deuxième, qu’ici on nous raconte