Coluche Président est une uchronie originale et potentiellement intéressante. En effet, j’ai toujours entendu parler de la candidature de Coluche aux élections présidentielles en 1981et en découvrant la présence de Fabrice Erre sur la couverture, j’espérais avec optimisme une exploitation efficace des possibilités humoristiques de la présence de ce brillant comique à l’Elysée. Pour mener à bien ce projet l’auteur de Une année au lycée a confié le scénario à son frère Jean-Marcel.
L’histoire débute en mai 1981 par l’élection de Coluche. Ensuite, se succèdent une série d’événements qui s’étalent sur la première année de présidence du héros. Les différents temps forts sont datés et découpent ainsi la narration en une suite de petits chapitres. La structure propose ainsi un rythme régulier qui offre des relances scénaristiques régulières. Néanmoins, le risque de ce choix de construction est de proposer des situations à la réussite et la drôlerie inégales. C’est ici le cas et je dois bien avouer que toutes les décisions prises par le Président ne m’ont pas touché de la même manière.
Coluche est un personnage connu. Il est donc facile pour le lecteur de se projeter dans l’uchronie proposée. En effet, il est aisé d’imaginer le fonctionnement qu’aurait pu adopter Coluche s’il avait tenu les rênes du pouvoir. Cet état de fait facilite l’immersion dans l’histoire mais il rend aussi plus compliqué le travail des auteurs pour surprendre. Le thème de l’album génère ainsi une exigence certaine pour arriver à faire rire le lectorat et à se montrer imprévisible à ses yeux.
Coluche chamboule logiquement les habitudes. On n’en attendait pas autre chose ! Les apéros sont de sortie et les fiestas régulières ! Cette nouvelle politique aboutit logiquement à l’instauration d’un ministre de l’apéro suite à des revendications d’inclusion de ce moment convivial dans le temps de travail, de son enseignement à l’école et de son remboursement par la sécu… Tout cela fait davantage sourire que rire. En effet, les traits sont gros et manquent globalement de surprise.
L’enchainement des différents chapitres permet de relancer régulièrement l’histoire. En effet, ce découpage alimente l’intrigue de nouveaux enjeux toutes les quatre ou cinq pages. Cela donne un rythme de lecture intéressant. Néanmoins, cela n’empêche pas pour autant le côté répétitif de la narration dû à un manque de diversité et de variétés des intrigues. Au final, les mécanismes et les ingrédients scénaristiques sont toujours les mêmes. Ainsi, le personnage principal n’évolue pas vraiment. C’est dommage.
La présidence de Coluche est mise en image par la plume reconnaissable de Fabrice Erre. Le style de l’auteur correspond parfaitement au ton de l’histoire. La rondeur des personnages accompagne joliment les gags. Leurs expressions et leurs postures participent activement à l’humour que dégage chaque planche. Les dessins donnent le sourire et c’est agréable !
Au final, mon bilan est mitigé. Le potentiel de l’idée de départ semblait intéressant. Néanmoins, le résultat manque d’ampleur et est assez redondant dans son scénario. L’ensemble manque de surprise. Je pense qu’il s’agit davantage d’un livre qui se picore plutôt qu’il ne se lit d’une traite. Ainsi, on aura plaisir de retrouver régulièrement Coluche et sa politique originale en passant aisément au-dessus de certains défauts de l’ouvrage…